vendredi 30 décembre 2011

Dernière tribune libre de l'année 2011 : Quel livre a marqué pour vous cette année 2011 ? Quel évènement bibliophilique ?



Chères amies bibliophiles ou bibliomaniaques (permettez messieurs que je commence par saluer les quelques Dames qui nous lisent), cher amis amateurs de bons et beaux livres, demain sera le dernier jour de l'année 2011. Une année passe si vite que l'on a parfois du mal à suivre...

J'espère que le Bibliomane moderne vous apporte (presque chaque jour) votre lot de découvertes et de surprises en "amour des livres", amour des livres, qui, on le voit bien, va souvent jusqu'à la passion la plus déréglée. Mais après tout, n'est-ce pas dans les passions déréglées qu'on retrouve un peu de soi-même ? Les blogs qui traitent de bibliophilie ou de l'amour des livres anciens et modernes de collection sont désormais en nombre et apportent, chacun à leur manière, de quoi contenter l'amateur. C'est une belle chose pour nous tous.

2012 sera une année importante à plus d'un titre, elle apportera son lot de contentements et de mécontentements, mais chacun, pour peu que la bonne santé soit au rendez-vous, et que l'économie des ménages permette à chacun de suffire aux besoins du foyer et aux "petites passions" et tout sera parfait. Espérons-le ainsi.

Il y a quelques jours de cela j'ai écouté une émission de radio dont l'invité était un éminent commissaire priseur parisien, renommé pour ses ventes VIP et plutôt orientées vers l'Art Contemporain. J'avoue que j'ai écouté cette émission avec une grande attention et que j'ai essayé d'en retirer tous les enseignements possibles pour l'avenir. Ce commissaire priseur, sans être prophétique, donnait quelques clés pour "comprendre le marché de l'art", pour "bien investir", pour "acheter de l'art". Je reste très dubitatif sur ses propos. Si je résume ce qu'il a dit et qui peut s'appliquer à n'importe quel objet d'art vendu aux enchères, cela donne quelque chose du style : "N'achetez pas ce que vous aimez ! Apprenez à aimer ce qui est bien !" (...) "Quand on collectionne il faut apprendre" (...) "Achetez au dessus de vos moyens ! Achetez des chefs d’œuvre ! Payez en quatre fois, mais quand vous avez un chef d’œuvre vous avez un chef d’œuvre... Quand vous avez quatorze croutes vous avez quatorze croutes (...)"

Il explique ensuite que la vente aux enchères est un jeu de séduction... pour lui la salle est une femme...

Très intéressant tout ça. Il ajoute : "collectionner n'est pas un problème d'argent, c'est un problème de connaissance, alors il est clair que si vous voulez acheter ..." (la phrase n'a pas été terminée... on comprend pourquoi). Vous pouvez écouter ou réécouter cet entretien intéressant ICI.

Si l'on s'en tient au domaine du livre et plus particulièrement du livre ancien ou moderne dit de collection ou rare, ces conseils sont-ils aussi judicieux ? Sans doute.

Mon humble avis sur la question est plus nuancé. Mes constats sur un peu plus de 20 années de collection, de recherche assidue du livre rare, du document curieux, m'a amené plus d'une fois à m'interroger sur ce marché, sur ses habitudes, sur ses mœurs, sur son avenir. Quelques constats : si les livres anciens et rares restent recherchés, des pans entiers sont désormais devenus complètement hors marché (je veux parler notamment des livres de références et autres bibliographies classiques, mais aussi de nombreux petits livres d'art ou de monographies, aujourd'hui sévèrement concurrencés par la numérisation et la mise en ligne des sources, je veux parler aussi des livres imprimés dans des langues mortes, latin, grec, hébreu, etc, ouvrages aujourd'hui la plupart du temps boudés par les amateurs si ce ne sont pas en même temps de riches livres illustrés). C'est ainsi. A contrario, quels sont les secteurs qui marchent ? Les livres anciens très illustrés, les grands classiques d'auteurs passés à la postérité, qu'ils soient français ou étrangers (Zola, Hugo, Maupassant, Hemingway, Proust, Céline, etc). Les autographes et les livres modernes dédicacés importants sont aussi très convoités. Peut-être me direz-vous : "comme depuis toujours". Sans doute. Les livres modernes, les livres d'artistes sont aussi à mon avis en plein essor. Autant dire que si vous recherchez des éditions anciennes d'Aristote ou de Cicéron vous avez de bonnes chances de les obtenir pour rien ou presque... mais ce n'est pas aussi simple puisque si les mêmes sont recouverts de riches reliures anciennes en maroquin ou ayant appartenu à de nobles bibliophiles tels Grolier ou Maïoli, vous avez peu de chance de les avoir à bon compte. Alors comme toujours, tout est une question de dosage, de moyens, de savant mélange de passion et de raison. Savoir se faire plaisir tout en sachant garder la tête froide. Est-il raisonnable d'acheter un livre au delà de 50.000 euros ? Doit-on d'ailleurs se poser la question ? J'ai lu hier que le manuscrit enluminé de la Vie de Sainte Catherine d'Alexandrie (vers 1474) avait finalement rejoint les collections de la Bibliothèque Nationale de France, faisant suite à un mécénat important et à diverses souscriptions à hauteur de 4,5 millions d'euros. Ce manuscrit sera d'ailleurs présenté au public courant 2012 par la BNF. Évidemment nous sommes là dans l'exceptionnel, la pièce de musée. Vous êtes-vous déjà posé la question de savoir à partir de quels critères une pièce de collection devait être classée "monument national" ? Quels autographes ? Quels livres ? Quels chefs d’œuvre de la peinture ? de la sculpture ? La réponse n'est pas aisée. Pourtant elle me semble légitime. Ce qui m'amène à revenir sur les propos du commissaire priseur évoqué ci-dessus : "N'achetez pas ce que vous aimez ! Apprenez à aimer ce qui est bien !" Je trouve cela très réducteur. Cela ne laisse la place finalement ni à la curiosité ni à la fantaisie. Et si moi je préférais Gavarni à Picasso ? Et si vous préfériez les éditions populaires du XIXe siècle imprimées sur mauvais papier aux incunables imprimés sur peau de vélin ? Et si la valeur des choses rares ne donnait finalement qu'une bien mauvaise image la curiosité des amateurs les plus nombreux. Pour tout vous dire je conçois assez mal toute cette débauche préfabriquée autour de l'Art Contemporain qu'on nous impose à longueurs de pages dans les colonnes de la Gazette Drouot notamment. J'aime avoir envie de dire : "ce n'est pas parce que vous me les montrerez mille fois que je les aimerai mille fois plus !" On a le droit d'aimer ou de ne pas aimer. On a aussi le droit de trouver que le prix de l'indécence à des limites. 180.000 euros pour une toile de Pierre Soulages "brou de noix sur papier" (1950) ... 410.000 euros pour un dessin érotique de Balthus (1954) .... alors que des toiles de petits maîtres français ou italiens du XVIe ou du XVIIe s. se vendent le plus souvent pour quelques milliers d'euros seulement, parfois beaucoup moins. Je reste songeur. Si j'adapte ce processus aux livres, je ne donne pas cher de la peau de nombreux bibliophiles qui ne s'y retrouveront bientôt plus. Car impose-t-on finalement à quelqu'un ce qu'il doit aimer ? L'amour de l'art à l'image de l'amour pour une femme nait, me semble-t-il, d'une rencontre magique, d'un instant, peu importe tout le reste, que la femme fut riche ou pauvre, jolie ou laide, l'important c'est d'aimer. Alors ? Nous verrons bien... seul l'avenir nous dira ce qu'il adviendra de tout ça, de tout ce que l'on nous impose. Peut-être suis-je totalement dans l'erreur... ou pas.


Voici donc ma question qui vous occupera si vous le voulez bien jusqu'au début de l'année prochaine (le temps que je me remette de quelques fantaisies gastronomiques et œnologiques...) :

Quel livre a marqué pour vous cette année 2011 ? Quel évènement bibliophilique ? Que retiendrez-vous de cette année 2011 en la matière ?

Vous pouvez vous exprimer en toute liberté, sur tout ce qui vous vient à l'esprit, nous dire ce que vous pensez, ce que vous ressentez de votre passion, vos envies, etc.

Tribune libre ! A vos claviers ! (et pas de timidités inutiles... merci !)

Bonne soirée et meilleurs vœux pour cette nouvelle année 2012 Bertrand Bibliomane moderne

jeudi 29 décembre 2011

Nouvelle acquisition : un dessin à la mine de plomb par Paul Gavarni (sans date). La songeuse.


Dessin original à la mine de Plomb par Paul Gavarni (1804-1866).
Format 38 x 27 cm - 25 x 20 cm pour le sujet
Signé en bas à droite


Le Père Noël, comme le facteur (la factrice en l’occurrence), sonne toujours deux fois ! Il vient de passer à nouveau.

Il a délicatement déposé un gros paquet, pas très lourd, confectionné avec soins par l'expéditeur attentionné (ce qui fait toujours plaisir). Ce gros colis contenait un dessin que je viens d'acquérir. Encore un dessin original signé GAVARNI. Vous retrouverez ICI l'ensemble des billets que j'ai consacré cette année et les années précédentes à cet artiste à mon sens injustement reconnu aujourd'hui (mais ça je ne vais pas le crier non plus trop fort...).


Signature de Paul Gavarni.


Quid de ce dessin ? C'est un dessin à la mine de plomb, encore dans son cadre ancien (probablement un cadre des années 1880-1900 portant au dos l'étiquette de la Maison G. Amaury, 62 rue de La Boëtie, près le Faubourg St-Honoré, à Paris). Ce cadre est en bois stuqué blanc avec bordure intérieure dorée. L'ensemble mesure 38 x 27 cm. Le dessin a été encadré tel quel sans passe-partout. Il occupe la presque totalité de la surface du cadre. Le sujet mesure 25 x 20 cm environ mais la signature GAVARNI est tout au bas de la feuille, au ras de la baguette d'encadrement (voir photo de la signature). Ce dessin n'est ni daté, ni légendé.


Détail
s


Il représente une jeune fille ou une jeune femme, le regard baissé, les mains l'une contre l'autre près de la poitrine. On devine un dossier de fauteuil sur lequel elle est assise. Elle porte une petite coiffe et une belle robe dont la partie basse n'est qu'esquissée pour s'évaporer rapidement et laisser place à l'imagination de celui qui regarde cette œuvre. Le visage de cette jeune femme est très abouti et très finement dessiné, on y reconnait sans conteste la patte de Gavarni "croqueur de femmes". Que fait cette jeune femme le regard ainsi baissé ? Je viens de demander à mon épouse, elle m'a répondu instinctivement : "elle brode peut-être (...) ou elle pleure (...) ou un homme étant en train d'essayer de la séduire, elle baisse les yeux et regarde le sol et ne sait plus quoi faire de ses mains..." Belle imagination !... Je vous laisse y voir ce que vous voulez.

Je n'ai pas encore eu le temps de chercher dans le catalogue raisonné de l’œuvre de Gavarni si ce dessin y avait déjà sa place où s'il n'a pas encore été répertorié.

Je suis bien évidemment preneur de toute information concernant ce charmant dessin qu'on pourrait intituler "la songeuse".

Je suis très heureux de cette nouvelle acquisition qui ira rejoindre les quelques autres dessins rassemblés depuis quelques années.

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

Brèves de fin d'année, Part X : les Etrennes du bibliophile ... iconographie bouquinière (suite) ...


Lot 15, "Une Liseuse de Romans" by Vincent Van Gogh, oil on canvas, 28 3/4 by 36 1/4 inches, November 1888. Christie's sale, nov. 3, 2010.

"Another oil on canvas by Van Gogh is Lot 15, "Liseuse de Romans." It measures 28 3/4 by 36 1/4 inches and was painted in November, 1888. It has a modest estimate of $3,000,000 to $4,000,000. It sold for $3,106,500. It was once in the collection of John Hay Whitney of New York. It has been widely exhibited and published. Van Gogh disagreed with Paul Gauguin's emphasis on painting from "abstraction" and from "memory," but this painting was done from "memory." "The formal aspects of the present painting," the catalogue noted, "also point to Gauguin's influence. The flat planes of color, framed in heavy black outlines, recall the style of cloisonnisme established by Gauguin, Bernard, and Louis Anquetin at Pont-Aven earlier in the year. Particularly noteworthy is Bernard's Les Bretonnes dans la prarie from August 1888...which anticipates both the emphatic contours and the distinctive palette...of Van Gogh's Liseuse. Bernard gave this canvas to Gauguin, who brought it with him to Arles; Van Gogh found the painting so original that he made a watercolor copy." (source : http://www.thecityreview.com/f10cimp1.html) By Carter B. Horsley

Il vous suffisait de 3 millions de dollars pour voir cette "liseuse" trôner dans votre salon... ou pas.

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

Brèves de fin d'année, Part IX : les Etrennes du bibliophile ... iconographie bouquinière (suite) ...


Carte postale ancienne des années 1920.


Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

Brèves de fin d'année, Part VIII : les Etrennes du bibliophile ... iconographie bouquinière (suite) ...


Étude de nu (bibliophile ?)
Tirage photographique des années 1910-1920.
Vue stéréoscopique (image en relief grâce à des lunettes stéréoscopiques).


Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

mercredi 28 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part VII : les Etrennes du bibliophile ... iconographie bouquinière...


Tirage photographique des années 1920-1930. Allemagne.
Carte postale à usage très privé.
Collection particulière B. H.-R.


Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

Les devantures de librairies anciennes en images par la carte postale : la librairie P.-V. Stock au 155 rue St-Honoré à Paris.


La Librairie P.-V. Stock au 155 rue St-Honoré
devant le Théâtre-Français, à Paris.

Carte postale ancienne, vers 1910.

Les familiers de Kropotkine, Cornelissen et Bakounine, entre autres libertaires-révolutionnaires, connaissent bien les éditions de P.-V. Stock publiées au tournant du XIXe et du XXe siècle. Je pense particulièrement à la Bibliothèque Sociologique avec sa célèbre couverture imprimée sur papier rouge. Nous en reparlerons bientôt. Célèbre éditeur qui prit tous les risques pour donner à lire des idées subversives et bien souvent condamnées par le pouvoir en place, P.-V. Stock marqua son temps et bien plus encore.

Le nom de P.-V. Stock fait résonner (raisonner) à mes oreilles de lecteur comme à celles des indignés du siècle dernier, comme une douce musique de liberté.

Le site internet de la maison d'édition P.-V. Stock est si bien fait qu'il serait inconvenant de la ma part de reprendre le travail, aussi me contenterais-je de vous donner l'adresse du site. Ainsi vous trouverez tout l'historique de cette célèbre maison d'édition ICI. C'est une bien vielle maison ! C'est pourtant Pierre-Victor Stock qui lui donnera son nom en 1877 en en prenant la direction. Il la dirigea de 1877 à 1921. En 1921, elle est rachetée par Maurice Delamain et Jacques Boutelleau - alias Jacques Chardonne.

Et qu'y-a-t-il encore aujourd'hui au 155 rue St-Honoré, juste en face le Théâtre-Français ? Voyez ci-dessous. La libraire Delamain a résisté à l'envahisseur dans ce si joli quartier de Paris à deux pas du Louvre et du Palais-Royal.

Le 155 rue St-Honoré à Paris. Photo Google Map (2008).
Librairie Delamain.

J'aurai bientôt l'occasion de vous reparler de l'éditeur Pierre-Victor Stock, mais patience...

Et pour finir sur une note libertaire, je dois vous dire que ce court billet m'a été inspiré ce soir par la lecture d'une fiche biographique d'un illustre inconnu sur lequel je cherchais quelques informations sur le net. Et je trouvai : "(...) a fait carrière dans la banque internationale. Il se consacre maintenant à l'histoire et à la littérature." J'ai trouvé ça si beau ! et si encourageant ! (pour les banquiers et leur potentiel de reconversion évident je veux dire) que je n'ai pu m'empêcher de relire deux pages de Kropotkine (Paroles d'un révolté) avant de m'éteindre jusqu'à demain.

Je suis certain que 2012, sans prophétiser, sera un bon cru ! (je veux dire pour les esprits libertaires... ou pour les banquiers... qui sait ?).

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

lundi 26 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part VI : Daumier est-il mort en pauvreté ? Des nouvelles de nos amis du Daumier Register www.daumier-register.org



Voici quelques nouvelles d'Honoré Daumier via nos amis du Daumier Register, Lilian & Dieter Noack www.daumier.org & www.daumier-register.org

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Chers amis de Daumier,

Daumier est-il mort en pauvreté ? Cette question a souvent été étudiée et personne n'a été en mesure de donner une réponse satisfaisante. Dans notre site Daumier (http://www.daumier.org/index.php?id=176) nous avons essayé de composer une liste de prix et coûts différents pour donner un aperçu général de la vie quotidienne du temps de Daumier.

Par chance, nous venons maintenant de découvrir une lettre manuscrite de Daumier, qui se trouve dans une collection privée. Elle montre que Daumier, le 16 Décembre 1862, a dû vendre certains de ses meubles. Vous trouverez une copie de la lettre dans l'annexe à ce mail.

Nous devons supposer que cette lettre est une indication de la mauvaise situation financière pendant cette période de la vie de Daumier. Vous vous rappelez peut-être qu' en Février 1860 Philipon avait démissionné Daumier. En conséquence Daumier se trouvait en difficultés financières au moins jusqu'en Décembre 1863, quand après la mort de Philipon il travaillait de
nouveau pour le Charivari. La pauvreté est un thème récurrent dans l’œuvre de Daumier. Notre petit vidéo « DAUMIER et la pauvreté » sous http://www.youtube.com/watch?v=e2ZQ9y4v9Ag en donne une impression.

Lilian et Dieter Noack du Daumier Register vous souhaitent bonnes fêtes et une heureuse Année.

Cordialement,

Lilian & Dieter Noack
www.daumier.org & www.daumier-register.org
Center for International Daumier Research

***Videos: http://daumier-videos.webs.com/***

Brèves de fin d'année, Part V : un dessin original non signé, encre de chine et aquarelle, vers 1960-1970 ?



Format 25 x 15 cm. Encre de chine et aquarelle.
Vers 1960-1970 ?


Tout droit sorti de l'imagination fertile d'un artiste inconnu ... un dessin original à l'encre de chine et mis en couleurs. Ce dessin date probablement des années 60 ou 70. Le carton support semble dater de quelques dizaines d'années. A-t-il servi pour illustrer une couverture de BD adulte ? C'est ce que j'entends bien savoir.

Et vous ? Vous en pensez quoi de ce dessin ?

PS : ce dessin acheté en même temps que d'autres (que je vous montrerai peut-être si vous êtes sages...) doit être l'oeuvre d'un anglo-saxon compte tenu de la légende que comporte certains d'entre eux.

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

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Dessin que je suppose être du même artiste ?
A voir...

dimanche 25 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part IV : le Père Noël est passé... une assiette Creil & Montereau "bouquiniste" pour bibliomane ...




Assiette en faïence de la fabrique Creil & Montereau
(fabriquée entre 1884 et 1895).
Décor imprimé polychrome. Diamètre 20,5 cm.
Très bon état.
Cette assiette fait visiblement partie d'une série consacrée aux bouquinistes,
celle-ci porte le n°6 et est titrée au dos de l'assiette
"Bouquiniste. (pour savants). 6."


Curiosité bibliomanique... inutile de vous dire que je recherche les autres assiettes de cette série...


Joyeux Noël à toutes et à tous,
Bertrand Bibliomane moderne

samedi 24 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part III : la bibliophilie c'est chouette !


Photographie ancienne. Tirage argentique, vers 1920 (USA).
Collection privée B. H.-R. (depuis pas très longtemps...)

La bibliophilie c'est chouette non ?

Joyeux noël à toutes et à tous,
Bertrand Bibliomane moderne

Brèves de fin d'année, Part II : huile sur toile de Gabriel Hervé intitulée "Pendant le repos".


Huile sur toile de Gabriel Hervé intitulée
"Pendant le repos"

Quelqu'un sait-il où se trouve ce tableau exposé au Salon de 1910 ?

Joyeuses fêtes à toutes et à tous,
Bertrand Bibliomane moderne

vendredi 23 décembre 2011

Brèves de fin d'année, Part I : De la lecture moderne... ou pas.


CLAUDE B. TENOT PHOTOGRAPHE PORTRAITISTE

Pensez-vous que cela vous ferait la même chose si vous voyiez cette demoiselle lire sur un iPad ?


Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

Charmante et délicieuse bibliophilie féminine d'antan.





Que lit-elle ? J'opterais pour un volume du Larousse Universel Illustré, pas vous ?


Bonnes fêtes de fin d'année à toutes et à tous,
je vous laisse en compagnie ce joli minois bibliophile 1900,


Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

mercredi 21 décembre 2011

Annuaire des ventes de livres 1984-1991 : un argus des livres de collection méconnu et peu courant.



Si vous lisez le Bibliomane moderne depuis le 15 octobre 2008 alors vous avez lu l'article consacré à l'Annuaire des ventes de livres de Léo Delteil, publié entre octobre 1918 et 1930 avec un volume supplémentaire pour l'année 1931 par M. Lang (imprimé en 1933). En 1934 paraitra de manière séparée mais dans le même esprit et reprenant à peu près la même ligne éditoriale le "Vade mecum du libraire et de l'amateur ou liste alphabétique et prix des livres adjugés à l'hôtel des ventes de Paris d'octobre 1933 à juillet 1934." Ce volume possède les mêmes qualités que les volumes du "Delteil". Soit 13 volumes regroupant plusieurs dizaines de milliers de résultats de ventes aux enchères de livres. Une mine ! mais il faut chercher dedans volume après volume... c'est parfois assez décourageant sauf si le livre que l'on cherche en vaut vraiment la peine. Je vous laisse lire ou relire mon billet de l'époque où vous pourrez retrouver les autres "argus" parus les années suivantes et ce jusque dans les années 80 (Grolier, Maetterlin, Argus du livre de collection). Je m’aperçois qu'à l'époque ce billet n'avait reçu aucun commentaire... sans doute le sujet est-il quelque peu rébarbatif. Celui-ci risque de l'être également. Tant pis ! Je poursuis le chemin dans le même sens.


Il y a quelque temps déjà j'ai fait l'acquisition d'un ensemble qui m'avait paru très intéressant et surtout qui m'était totalement inconnu. Il s'agit de l'Annuaire des ventes de livres pour les années 1984 à 1992. Soit 8 volumes grands in-4 (27,5 x 22 cm) de plusieurs centaines de pages chacun. 8 volumes reliés pleine toile beige, titre imprimé à froid en marron sur les plats et aux dos. Jolie série imprimée sur beau papier. Le premier volume est pour l'année 1984 et a été publié chez Hubschmid & Bouret, 11, rue de Sèvres, Paris 6e. (volume imprimé en 1985 - dépôt légal : avril 1985 - imprimé en France par Pollina à Luçon).

Que nous disent les éditeurs en préambule ?

"Voici la première édition de l'Annuaire des Ventes de Livres. Nous l'avons conçu en fonction de quatre impératifs. Premièrement : la parution annuelle, qui permet de saisir très rapidement les tendances d'un marché qui évolue constamment. Deuxièmement : pas de sélection. Nous publions tous les résultats et notre but sera d'être de plus en plus complet. Troisièmement : présenter une vue d'ensemble des prix du livre ancien. Pas seulement des prix obtenus en salle de vente mais aussi ceux pratiqués par les libraires. Ainsi chacun pourra se faire une idée du cours à l'achat et à la vente de tel ou tel ouvrage. Quatrièmement : le prix de vente le plus bas possible, afin de faciliter la diffusion et une meilleure connaissance de la valeur des livres anciens. Nous espérons servir ainsi le Livre Ancien : la profession, mais aussi les amateurs. Afin d'améliorer les prochaines éditions, nous demandons à tous les utilisateurs de nous communiquer leurs suggestions et critiques. Il nous faut remercier les vingt libraires qui ont eu le courage de donner publicité à leur prix de vente(*). Nos remerciements vont aussi à Messieurs les experts et commissaires-priseurs qui nous ont aidés avec une amabilité constante et beaucoup de bonne volonté." Signé : "Les éditeurs". (première année, 1984)

L'entreprise était louable et fort bien annoncée.


Qu'en est-il du point de vue de la réalisation ?

A vrai dire, la maquette est assez curieuse. Les notices sont classées par ordre chronologique des auteurs (parfois des titres). Elles sont imprimées dans différentes tailles de caractères et différentes polices. On dirait que ce sont les notices des catalogues "photocopiées" (et non recopiées - voir photo). Les prix ont été ajoutés à la main en dessous de chaque notice, ce qui n'est pas sans donner un certain "charme" à cette documentation qui fait presque "artisanale".

Reste à savoir si cet Annuaire est aussi complet qu'il le prétend ? ... je serais bien incapable de le dire. Les volumes, de grand format, imprimés sur deux colonnes, avec quelques illustrations, renferment néanmoins plusieurs dizaines de milliers de résultats pour les années concernées ce qui est fort intéressant.

Ainsi, dans le premier volume, si je me reporte à MONTAIGNE, on lit sous le n°29 (numéro de la vente - voir table en début de volume - et ici reporté à la main comme le prix), ESSAIS, Bourdeaux, 1580, 2 vol. petit in-8, maroquin lavallière de Cuzin père etc. Superbe exemplaire. Adjugé 175.000 francs (vente Ader Picard Tajan, 29 mars 1984).

Accès facile. Résultat rapide. Évidemment les prix sont de vieux prix... mais cela donne tout de même une indication et permet surtout de retrouver assez facilement des exemplaires vendus aux enchères entre 1984 et 1992.

Quid de la deuxième année ?

Je laisse la parole aux éditeurs (les mêmes) du second volume :

"Voici la seconde édition de l'Annuaire des Ventes de Livres. On remarquera que ces dernières années le marché du livre s'est particulièrement développé en France. Paris avec l'Hôtel Drouot reste la première place du monde pour les ventes de livres aux enchères. La librairie française se porte bien, même si l'amateur se plaint de la difficulté croissante de trouver des exemplaires de qualité à des prix raisonnables. Le prix des livres n'a cessé de croître à tel point que certains lorgnent avec la gourmandise d'un financier les vitrines des libraires et les catalogues de ventes publiques. Sans vouloir sublimer la passion des livres il est préférable pour tous, d'écarter ces tentations souvent malsaines. Le marasme dû à la spéculation intensive qui s'est produit il y a quelques années dans la numismatique peut être un bon rappel de ces dangers. Cette envolée particulièrement sensible pour les livres illustrés (livres de peintres, illustrés modernes) n'a pourtant pas encore donné de signe d’essoufflement. Elle s'est même étendue à tous les exemplaires exceptionnels et il faut reconnaître que l'année 1985 nous a offert de belles ventes. On devra donc davantage considérer les résultats de ventes en tant que cote maximum alors qu'autrefois professionnels et amateurs consultaient les annuaires de ventes pour se faire une idée de base (les résultats étant souvent inférieurs à ceux pratiqués en librairie). Le phénomène aurait donc tendance à s'inverser ou du moins à se modifier considérablement. Puisse notre annuaire avec ses milliers de cotes obtenues en cette année faste aider nos lecteurs dans leur choix." (avan-propos pour l'année 1985).

Que de sagesse !


Quid de la troisième année ?

"Nous vous présentons la troisième édition de l'Annuaire des ventes de Livres. Bonne continuité dans la progression des résultats de ventes de livres même si en quelques domaines des signes de stabilité apparaissent au cours des ventes. Comme pour 1985 plusieurs belles ventes ont eu lieu à l'Hôtel Drouot mais aussi en province où l'on aura remarqué les 7 800 000 francs d'adjudication pour un manuscrit exceptionnel exécuté vers 1200 (Maître Pierre Poulain commissaire-priseur et Monsieur Jean Morel expert). A Paris on notera aussi les 1 700 000 francs d'un manuscrit de Jean Genet : Journal d'un voleur, 155 pages (Maître Ader, Picar, Tajan, commissaires-priseurs associés, expert Maryse et Michel Castaing), dans cette même vente du 4 juin, le Bestiaire ou Cortège d'Orphée d'Apollinaire illustré par Dufy et relié par Sonia Delaunay atteignait 800 000 francs (Maître Guérin et Courvoisier experts). Un autre manuscrit exceptionnel du début du XVIe siècle et consacré aux chevaux était adjugé 1 900 000 francs le 25 février (Maîtres Couturier et Nicolay, expert Monsieur Guy Martin). Même les Jules Verne que chaque année l'on dit moribonds, atteignent le 20 avril de belles cotes chez Maître Hervé Poulain (expert Monsieur Michel Roethel) avec 62 000 francs pour le fameux "Sans dessus dessous", les exemples seraient trop nombreux pour que l'on puisse grever cet avant-propos de résultats contenus dans le présent annuaire. Cependant on notera avec un peu de tristesse que tous ces bons résultats qui font de Paris la première place pour le livre ancien, n'ont pas empêché l'année suivante de laisser se dérouler à Monaco et sous les auspices d'une maison de ventes anglaise l'une des plus belles dispersions de ce siècle d’ouvrages consacrés à la chasse. Pour garder le sourire signalons un autre évènement de taille qui a eu lieu au printemps : la première vente aux enchères à Moscou depuis la Révolution d'Octobre, et bien sûr cette grande première était consacrée aux livres anciens." (avant-propos pour l'année 1986).

Pas mal ! Disons peut-être que "Tous les livres" se résume un peu à "très beaux livres exceptionnels" (mais c'est l'avant-propos... effectivement dans l'Annuaire on retrouve de tout et à tous les prix.


1987 c'est 15 000 notices annoncées extraites de 64 catalogues parisiens (Hôtel Drouot) et de 26 catalogues provinciaux. Pas de commentaires spéciaux pour 1987. Idem pour 1988. Idem pour 1989. Il n'y a pas de volume pour 1990. Et pour cause, une erreur sur les couvertures indique 1991 pour le volume qui donne les résultats "du 1er janvier au 31 décembre 1990". Idem pour 1992 qui donne les résultats "du 1er janvier au 31 décembre 1991". Le titre est cependant différente puisqu'il n'est plus question d'Annuaire mais de "Résultats de ventes publiques de livres anciens". C'est sans doute une erreur de la part des relieurs. La page de titre indique les bonnes dates. A noter que ces deux volumes pour 1990 et 1991 donc, et non pour 1991 et 1992, ont été édités par Ides et Calendes (Neuchâtel), conjoint au nom de l'ancien éditeur Hubschmid & Bouret. La présentation ainsi que les reliures sont identiques en tous points.

Voilà de quoi est composée ma série. Question : le volume marqué "1992" (pour l'année 1991) est-il le dernier de la série ?

J'ai téléphoné à la maison d'édition Ides et Calendes. J'ai eu quelqu'un de visiblement peu renseigné. La demoiselle en question ne savait pas me dire... Je n'ai pas insisté. Ce qui est certain c'est que j'ai cherché sur le moteur Vialibri pour savoir quels volumes étaient à la vente, et je n'ai trouvé que ceux que j'ai. Je suppose donc la série complète ainsi de tout ce qui a paru.

Nous voici donc avec une documentation riche (environ 15.000 notices sur 8 années soit environ 120.000 résultats de vente de livres entre 1984 et 1991), peu maniable mais agréable à consulter.

A noter que cette entreprise a été lancée en même temps que l'Argus du Livre de Collection. En effet, l'Argus du Livre de Collection édité par Promodis puis par le Cercle de la Libraire, puis par la société Artprice, existe depuis 1982 et 2008 (visiblement l'Argus papier édité par Artprice s'est arrêté à L'Argus du livre de collection 2008 : Ventes publiques avril 2007 - mars 2008). Internet a sans doute contribué à sa chute...

Bilan : une belle documentation (une de plus dirons certains) - utile ? ça dépend. Agréable : oui assez. Curieuse et sympathique entreprise en tous cas. D'ailleurs j'aimerais bien connaître les noms de celles et ceux qui étaient à l'origine de ce projet qui dura tout de même 8 années. Si vous souhaitez vous constituer la collection il vous en coûtera entre 20 et 60 euros le volume (source Vialibri), ce qui est somme tout assez raisonnable pour des volumes solidement reliés et très présentables.

Possédez-vous cette série ? Vous en servez-vous ? Comment considérez-vous la documentation de type "Argus" à l'heure du tout internet ? Votre avis nous intéresse.

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

(*) voici les 20 librairies en question : d'Argences (Paris), A. Bellanger (Nantes), Bourguignat (Paris), Chaminade (Annecy), Dasté (Paris), Jean-Paul Delon (Marigny-St-Marcel), G. Durance (Nantes), Geley (Paris), Guénégaud (Paris), Herbinet (Paris), Laffitte (Paris), Léonce Laget (Paris), Gérard Oberlé (Montigny-sur-Canne), Picard (Paris), Rossignol (Les-Arcs-sur-Argens), Rousseau-Girard (Paris), Stendhal (Paris), Table d'Emeraude (Paris), Le Tour du Monde (Paris).

mardi 20 décembre 2011

Un envoi d'Octave Uzanne à Georges Maurevert sauvé de la destruction certaine... (Cannes 25 XI. 1911)



Je ne vais pas vous dire que je l'ai trouvé dans une poubelle, mais tout de même, on s'en rapproche. Il m'aura fallut une chance de c... pour tomber sur cet exemplaire proche de la destruction totale. Piteux état en effet pour cet exemplaire (dé)broché du Sottisier des mœurs d'Octave Uzanne publié en 1911 chez Émile Paul. Livre intéressant au demeurant et que j'ai déjà lu et relu (oui je sais Uzanne est parfois comment dire... un peu... disons le mot... lassant, avec ses phrases alambiquées et ses néologismes à chaque coin de page. Mais bon, on ne va pas me changer ! Je l'ai adopté, j'assume !

Donc, voici que sur le faux-titre de ce volume minable trône un bel et long envoi de l'auteur à un certain Georges Maurevert.

J'avoue de suite mon inculture : je ne connais ni de près ni de loin ce
Georges ! Alors qui était-il ? Heureusement... internet est souvent notre sauveur express en l'occasion :

"Maurevert, Georges. Pseudonyme de Georges Leménager. Journaliste et écrivain français, né à Paris le 3 juin 1869, mort à Nice le 18 juin 1964. Il semble avoir adopté très tôt le pseudonyme de Maurevert, alias Charles de Louviers, seigneur de Maurevert, qui avait été chargé par Catherine de Médicis d'assassiner l'amiral Gaspard de Coligny le 22 août 1572. Dumas en fera Maurevel dans La Reine Margot, tandis que Meyerbeer lui réservera une place, sous son véritable nom, dans son opéra Les Huguenots. Enfin, l'intrigant assassin Maurevert inspirera abondamment un certain Paul Duplessis qui lui consacrera plusieurs ouvrages dans les années 1850-1860.

Il est donc difficile de saisir exactement la signification du choix de ce pseudonyme par le jeune Leménager. Certes, nous savons qu'il se proclame catholique en 1892 (cf Journal de Léon Bloy, 24 avril 1892), mais Léon Bloy nous le décrit comme un "libéral". C'est donc, sans doute, l'écho romanesque du nom de Maurevert qui aura séduit ce jeune homme qui débute dans le journalisme à La Libre Parole de Drumont, pour lequel il professe alors une grande admiration.

Issu d'un milieu aisé, il partage sa villégiature, dans les années 1890, entre Marnes-la-Coquette et la rue Milton, à Paris. Il fréquente les peintres Félix Ziem et Henry de Groux, dont il acquiert alors une œuvre. Il rencontre Léon Bloy chez leur ami commun, l'éditeur Adrien Demay. Il viendra en aide financièrement à Bloy et il l'aidera même à corriger les épreuves du Salut par les juifs (1892).


Cette même année, il semble se rapprocher des milieux anarchistes: il fréquente Emile Pouget, du Père Peinard. Il est alors un habitué du Napolitain, situé au commencement du boulevard des Capucines, où il côtoie Catulle Mendès, Jean Moréas, Laurent Tailhade, Alphonse Allais ou encore Georges Courteline, alors encore en pardessus. En 1895, il est reporter judiciaire à L'Echo de Paris, en même temps que Tailhade y signe ses "Tybalt". En 1898, on distingue sa signature dans la presse dreyfusarde: à La Volonté et à l'unique et confidentiel C'est Clair, par exemple.

C'est cette même année qu'il rencontre chez la mère Coconnier, rue Lepic, Bertrand Millanvoye, dépositaire de plusieurs poèmes de Rimbaud inédits dont il prendra copie et qui, grâce à lui, seront publiés pour la première fois, en 1906, par La Revue littéraire de Paris et de Champagne.

A cette époque, il collabore à La Revue Britannique et se lie d'amitié avec Jean Lorrain, Pierre Louÿs et surtout Maurice Maeterlinck. Il s'intéresse à l'espéranto et écrit des textes dans ce langage.


En mai 1901, il assiste son ami Laurent Tailhade dans son duel contre le fils de Francisque Sarcey. Et il aura encore l'occasion de lui témoigner sa fidèlité, peu après, par la fréquence de ses visites lors de l'incarcération du poète libertaire à la Santé.

Au début du XXe siècle, ce célibataire endurci se fixe définitivement sur la Côte d'Azur. Il sera le collaborateur régulier du Petit Niçois, puis de L'Eclaireur de Nice, où il côtoie Camille Mauclair et Pierre Borel. En 1912, il part en campagne contre les panneaux publicitaires qui défigurent la Côte d'Azur. Tailhade l'appuiera dans Je dis Tout du 22 juin 1912. En manière de remerciement, l'année suivante, il accordera son suffrage au polémiste lors de l'élection du prince des journalistes. Héraldiste distingué, arbitre réputé de combats de boxe, comme son ami Jean-Joseph Renaud, Maurevert aura également à cœur de mener campagne contre l'alcoolisme.

Après la 1ère Guerre Mondiale, on lit plus régulièrement sa signature dans les colonnes du Mercure de France.

Dans les années 1930, il est un pilier de l'Intermédiaire des Chercheurs et des Curieux et du Crapouillot, où il réalise le fameux numéro spécial Légion d'Honneur. Il collabore également à La Guiterne, précieuse revue créée en décembre 1931 par J.-L. Aubrun, auprès duquel on rencontre Louis de Gonzague Frick, Fernand Divoire, Fernand Kolney, René-Louis Doyon, Adrien Le Corbeau, Ernest Raynaud etc.

Durant la Seconde Guerre Mondiale, il donne quelques nouvelles alimentaires à L'Alerte, le journal pétainiste de Léon Bailby. Notons, au passage, qu'y collaborent en même temps : Montherlant, Jean Renoir, Abel Gance, Guillain de Bénouville, Maurice Martin du Gard, André-Paul Antoine, Cora Laparcerie-Richepin, Guy des Cars, sans parler des dessinateurs Dubout et Sennep. De même, il donnera un texte dans l'ultime numéro de Je Suis Partout du 16 août 1944. Après la guerre, on retrouve sa signature dans Quo Vadis, revue ô combien tailhadophile." (*)

Et là d'un seul coup c'est fou comme on se dit qu'on ne connaissait pas quelqu'un qui méritait pourtant d'être connu ! Uzanne visiblement le connaissait.


Lisons ensemble cet envoi du maître :

"à Georges Maurevert, dont j'aime tous les éclats de style dans ses brillantes chroniques à feux variés de "L'éclaireur de Nice". (dont il est le phare à fulgurances trop espacées à mon gré ! -) Octave Uzanne. Cannes 25 XI. 1911."

Le 25 novembre 1911 Octave Uzanne était à Cannes (il devait y passer les hivers comme une bonne partie de la bourgeoisie aisée de l'époque) et Georges Maurevert était à Nice. Uzanne apprécie le style de ses articles publiés dans la presse locale (Nice). Ils avaient en commun d'être célibataires ... Il y a peut-être moyen d'en savoir plus sur les relations qu'on pu tisser ces deux hommes. Maurevert ayant vécu bien après Uzanne décédé en 1931.

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

(*) Les données présentées ici sur Georges Maurevert sont issues du site de G. Picq : http://tybalt.pagesperso-orange.fr/LesGendelettres/biographies/Maurevert.htm (je vous invite d'ailleurs à explorer en détail ce site internet très proche de nos préoccupations de bibliophiles, vous y trouverez des notices intéressantes et variées).

lundi 19 décembre 2011

Victor Champs (1844-1912) : petite histoire d'un relieur prolifique et renommé.


Acte de mariage de Victor Champs et Rose Hérissé
le 3 août 1867 à Thorigny-sur-Marne
Source : Archives Départementales de la Seine-et-Marne (en ligne).


Dans une vente aux enchères de livres ou un catalogue de libraire, il y a assez peu de chance pour que vous soyez passé à côté du nom suivant : Victor Champs ou V. Champs ou plus simplement Champs. C'est la signature de l'un des relieurs de la fin du XIXe siècle parmi les plus prolifiques et les plus renommés.

C'est une signature sinon rare, du moins parmi celles qu'on apprécie de rencontrer sur une reliure. Mon expérience personnelle de bibliophile et de libraire me l'a fait découvrir parmi les premières. Bien avant les signatures plus prestigieuses que sont celles de Trautz-Bauzonnet ou Chambolle-Duru. Je dis plus prestigieuse, mais finalement, je me demande bien pourquoi, parce que bien souvent, à choisir entre les deux noms, c'est sans doute sur Victor Champs que se porterait mon choix.

Une demi-reliure à coins, simple et sobre mais néanmoins parfaitement exécutée sur Germinie Lacerteux des Frères Goncourt (1886). Un des 100 ex. sur Japon.


Avant ce soir je ne connaissais rien de Victor Champs, peut-être tout comme vous d'ailleurs. Presque rien devrais-je dire, mis à part la notice assez succincte mais néanmoins utile qu'en donne Julien Fléty dans son Dictionnaire des relieurs français ayant exercé de 1800 à nos jours (éditions Technorama, 1988, p. 41). Notice que je reproduis ci-dessous en guise d'introduction.

"Victor Champs, né en 1844 à Meaux. Orphelin de père alors qu’il était très jeune, il dut travailler de bonne heure. Il fut mis en apprentissage chez un relieur de Meaux, sa ville natale, et s’adonna entièrement à son métier, pour lequel, dès le départ, il montra un goût certain. Comme beaucoup d’ouvriers à cette époque il fit son tour de France et vint ensuite à Paris ; il travailla successivement dans les ateliers Parisot, de Haas et Fayot. Mais son but était de s’établir et dès 1868 il reprit le fond de reliure Reinsch, place Saint-André-des-Arts, où il exerça jusqu’en 1876. A cette date, il transporta ses ateliers au 4 rue Gît-le-Cœur, qu’il agrandit à trois reprises. Aux travaux ordinaires du début, il substitua peu à peu des travaux plus soignés qui lui attirèrent la clientèle des bibliophiles pour des ouvrages rares qui ne devaient pas recevoir de décors compliqués mais néanmoins un habit digne d’eux. Ses reliures pour les bibliophiles sont recherchées par les collectionneurs, pour la bonne tenue de leurs corps d’ouvrage et le fini du travail. Avec Carayon, ils furent les relieurs qui, dans les travaux relativement simples, résumèrent le plus haut degré de la perfection d’exécution. Il mourut en décembre 1912. L’une de ses deux filles, Madeleine, avait épousé le doreur Léon Horelois, le 27 juin 1903." (Fléty, p. 41)

Demi-reliure à coins signée signée Victor Champs sur l'édition originale de La vie de Bohème d'Henry Murger (1851). Dos long, décor romantique à l'imitation.


Fléty est assez bien renseigné en fait. Cela m'a donné envie d'aller un peu plus loin. Cela m'a donné envie d'en savoir un peu plus sur l'homme qu'était Victor Champs, d'où il venait vraiment, sa famille. Voici donc quelques uns des premiers résultats de mes recherches (restées pour le moment tout à fait sommaires).

Victor Champs est né le 28 février 1844 à Meaux (Seine-et-Marne), fils d’Auguste Théodore Champs, marchand et d’Elisabeth Rosalie Thérèse Blot. Auguste Théodore Champs a 54 ans et Elisabeth Rosalie Thérèse Blot a 34 ans à la naissance de Victor. 20 années les séparent donc. Les deux témoins de cette naissance sont des proches de la famille, l’un est cordonnier et l’autre potier. Victor Champs vient d'un milieu modeste, milieu de petits marchands et d'artisans.

Signature de Victor Champs que l'on retrouve ainsi en général dans les demi-reliures, frappé en lettres typographiques à l'encre noire au verso blanc de la première garde de couleur ou au contreplat directement.


Signature de Victor Champs dans l'encadrement intérieur des plats, entre deux filets dorés, signé simplement CHAMPS. Cette signature se rencontre dans les exemplaires richement reliés en plein maroquin. Dans ce cas précis Victor Champs fait l'économie du "V." de son prénom dans la signature : cela signifie-t-il qu'il signe collectivement au nom de son atelier ?


J'ai retrouvé le mariage de Victor Champs qui fut célébré le 3 mars 1867. Victor a 23 ans. Il épouse à Thorigny-sur-Marne (Seine-et-Marne), Rose Hérissé. Dans l’acte de mariage, Victor Champs est déclaré relieur et domicilié au n°39 rue de la Harpe à Paris (son adresse à Paris alors qu'il n'était sans doute encore qu'ouvrier chez l'un ou chez l'autre des relieurs donnés par Fléty). Il n’a pas été fait de contrat de mariage. Le père de Victor est décédé (ce qu'avait indiqué Fléty - je n'ai pas encore retrouvé la date exacte du décès du père de Victor Champs). Sa mère est présente au mariage. Rose Hérissé a 24 ans et vivait alors encore chez sa mère à Thorigny-sur-Marne. La mariée est blanchisseuse. Le père de la mariée était également décédé au moment du mariage. Sa mère est présente. Elle est cultivatrice.

Reliures plein maroquin signées Victor Champs. Riches dorures aux dos. Sur le Virgile travesty de Scarron de 1668.


D'après les actes d'état civil, le père de Victor Champs est originaire de Meaux tandis que sa mère, Élisabeth Rosalie Thérèse Blot, est originaire de Nanteuil-les-Meaux, situé juste à deux pas de Meaux.

Fléty indique que Victor Champs a eu deux filles, dont l'une est prénommée Madeleine. Je n'ai pas encore retrouvé les actes de naissance de ces deux filles. Afin de compléter cette histoire de famille, il me reste à trouver l'acte de décès de Victor Champs, probablement mort à Paris en décembre 1912 comme l'indique Fléty. J'aimerais également retrouvé l'acte de mariage (27 juin 1903) de Madeleine Champs avec Léon Horelois, doreur. Ces actes permettraient en effet d'en savoir plus sur Victor Champs. Il faudra je pense (sauf hasard heureux) se passer de connaitre la physionomie de Victor Champs car visiblement il n'existe pas de portrait de lui dans la littérature ayant trait à l'histoire de la reliure. Son visage reste donc à découvrir. Il en va de même pour la marche de son atelier. J'ai cherché en vain dans l'ouvrage consacré à l'Exposition Universelle de Philadelphie en 1876, visiblement Victor Champs n'y exposait pas. On ne parle pas ou peu de lui dans les différents textes de l'époque consacrés à la profession. C'était visiblement un homme assez discret.

Demi-reliure en maroquin signée Victor Champs, dos lisse orné en long, filets dorés en encadrement dans le style romantique. Sur Les chants du crépuscule de Victor Hugo, édition originale (1835).


Les bibliophiles savent d'expérience que le travail rendu par l'atelier de reliure Victor Champs est presque toujours un travail de qualité. Parfois sobre ou même assez simple il est vrai (les bradels jansénistes non décorés simplement titrés et datés en queue ne sont en effet pas rares), mais souvent aussi un travail recherché, classique le plus souvent (dos à nerfs orné aux petits fers façon XVIIIe s. ou au contraire dos long orné de fers rocailles imitations assez réussies de reliures de la période romantique 1820-1840). Visiblement Victor Champs savait répondre à pratiquement toutes les demandes. Des plus simples au plus complexes. Il est vrai que les reliures complexes signées de ce nom sont plus rares, mais elles existent.

Voyons ce que pensait Octave Uzanne des reliures de Victor Champs, son contemporain en bibliophilie (on sait que le relieur préféré d'Octave Uzanne était son concurrent direct pour les cartonnages bradels, un certain Carayon, excellent relieur également dont nous parlerons bientôt) :

Demi-reliure de maroquin, dos à nerfs décoré aux petits fers, filets dorés, signée Victor Champs. Sur la Physiologie du mariage d'Honoré de Balzac (1845).


"Le commerce des demi-reliures en France a été incroyable en ce siècle, et la reliure pleine est devenue presque une exception. Sur les trois cents relieurs et cartonneurs que je puis compter dan l’Annuaire de la Librairie, plus des deux tiers ne font que la demi-reliure ; en province c’est pi encore, et je mets en fait qu’il n’existe pas dans tous nos départements vingt relieurs capables d’exécuter une belle reliure pleine, même un médiocre « janséniste ». — Les principaux relieurs parisiens qui excellent dans le demi-maroquin à coins. Le maître, à mon sentiment, le roi du genre est aujourd’hui M. Champs. — Nul mieux que lui ne sait préparer un livre, le coudre, le mettre en forme, le couvrir, et préparer ses maroquins. Les volumes qu’on lui confie restent chez lui des éternités ; les mois passent et les mois succèdent aux mois, sans que ledit relieur reparaisse muni de son précieux butin, c’est le champs de l’hypothèse et de l’impatience ; mais s’il possède l’art de faire languir sa clientèle, il possède aussi le talent de la ravir et de lui faire oublier toutes les jérémiades passées ; ce n’est plus de la demi-reliure qu’il nous apporte, c’est de la reliure à champs-levé, des maroquins pleins sur lesquels il semblerait avoir prélevé la place pour le papier fantaisie. Ses endossures sont remarquables ; ses maroquins, sans être laminés, polis à s’y mirer ; ses coins habilement recourbés, caressés au brunissoir et gentiment relevés d’un filet d’or. Les livres qu’il nous retourne s’ouvrent comme une maison amie, sans fracas et sans gêne ; de plus et, sans vouloir faire ici une réclame qui serait bien due à ce modeste travailleur, je puis dire que M. Champs fait toujours montre d’un goût délicat et qu’il sait fort convenablement assortir les gardes, les papiers des plats, les pièces de titre, les fleurettes mosaïquées, ainsi que combiner avec entendement les menus détails qui se doivent fondre dans une harmonie totale, généralement si difficile à obtenir. Un de ses élèves encore inconnu , M. Joseph Bretault, me paraît devoir se faire un nom recommandable : il possède l’amour du métier et le culte de son art, et s’efforce surtout d’apporter une note nouvelle dans la banalité des demi-reliures. Il est l’inventeur des fausses nervures carrées à fortes saillies qui donnent un caractère très original et très sérieux à ses dos délicieusement polis ; de plus, il réussit à merveille les coins ronds ou cintrés qui se courbent sur les tranches du volume en forme de gouttières et protègent aussi l’ouvrage en lui donnant à l’œil plus de légèreté et de grâce." (O. Uzanne, La reliure moderne artistique et de fantaisie (1887)"

On sait ainsi que Joseph Bretault "un de ses élèves" (faut-il comprendre ouvrier ?) était proche de Victor Champs. Le jugement d'Octave Uzanne sur le travail de Victor Champs me semble juste. C'est en tout cas ainsi que je perçois les reliures de cet habile relieur. En saura-t-on jamais plus ? Rien n'est moins certain.

Une superbe et étonnante reliure en veau sculpté signée Victor Champs (1894). Suffisamment rare pour figurer au catalogue de la Librairie Pierre Berès en 2004 "Six siècles de reliures".


Je vous laisse admirer une reliure très spéciale exécutée et signée Champs, reliure présente au catalogue "Livres rares - Six siècles de reliures" (Librairie Pierre Berès, 2004). Il s'agit de la reliure n° 138 sur : MOREAS Jean. Eriphyle, poème suivi de Quatre Sylves. Paris, Bibliothèque artistique et littéraire, 1894. In-8. Reliure de l'époque en veau bis et vert pâle, signée Champs ; riche bordure à motifs de chouettes sculptées encadrant trois côtés du premier plat, avec au centre la lume s'estompant progressivement ; au second plat, motif central d'une chouette en plein envol, les angles soulignés de battements d'ailes, tête dorée, couverture conservée. Belle reliure indique Pierre Berès. Et c'est en effet le cas ! Cette reliure est saisissante d'originalité, et surtout, elle tranche radicalement avec ce qu'on l'habitude de voir sous la signature de ce relieur. Je vous laisse voir la reproduction du premier plat ci-dessus.

Cette reliure est à rapprocher de celles exécutées par Charles Meunier ou bien Marius Michel ou encore Léon Gruel, spécialistes du genre avec la mosaïque aussi. Il semble qu'à cette date, 1894, Victor Champs ait eu, au moins cette fois, à céder à la mode du moment des cuirs modelés, sculptés ou incisés. Je n'ai pas pour le moment trouvé d'autres exemples à vous montrer de ce type de reliure portant la signature de V. Champs.


Demi-reliure à coins de maroquin, dos richement orné aux petits fers avec de petites fleurettes mosaïquées et un petit motif central mosaïqué également, de deux tons différents. Sur Mon oncle Barbassou de Mario Uchard (1884). Un des 50 ex. sur japon.

Pour en finir avec ce petit historique de la Maison Victor Champs, ajoutons que Jean Stroobants travailla a ses côtés un moment ou tout au moins pour lui. "Jean Stroobants était né à Paris en décembre 1856. Il fit son apprentissage chez Vignaux et Pasquier, rue Guénégaud, puis travailla chez Camus, chez Lenègre, chez Bertrand, où il devint premier couvreur. Ayant alors acquis une habileté et une sureté de main qui faisaient de lui l’un des meilleurs ouvriers de la profession, il s’établit à son compte et travailla à façon pour plusieurs relieurs dont Victor Champs, à qui il succéda au 4 rue Gît-le-Cœur en 1904. Il fut un travailleur acharné jusqu’au moment de sa mort, le 2 février 1922. Stroobants eut pour successeur son gendre, Paterson, qui signait ses reliures Stroobants-Paterson et mourut en 1936." (Fléty, p. 164)

J'ai placé tout au long de cet article quelques photographies de reliures signées Victor Champs qui me sont passées entre les mains. J'ai ainsi pu juger de la qualité du travail, toujours soigné et du fini impeccable, y compris pour les demi-reliures simples. Victor Champs (peut-être son ou ses ouvriers ?) avai(en)t la main sûre et résultat est à mon sens toujours une réussite. Je tiens à souligner que j'apprécie particulièrement les bradels signés de ce nom qui permettent l'ouverture parfaite des volumes avec des dos brisés (décollés des fonds de cahiers) pour une consultation très agréable des livres ainsi reliés. Tout le monde ne pouvait pas en dire autant et les grands noms que furent Lortic, Cuzin, Chambolle-Duru ne me démentiraient pas !

Pour résumé, je suis assez fan des reliures signées Victor Champs, vous l'aurez compris. Vu le nombre de reliures portant sa signature qu'on rencontre aujourd'hui, j'imagine qu'il a du relier plusieurs milliers de volumes en l'espace d'une vingtaine d'années. Les plus belles reliures portant son nom sont sans aucun doute encore à découvrir.

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

samedi 17 décembre 2011

Une lithographie d'Honoré Daumier à l'honneur : une très rare épreuve avant la lettre sur blanc de "Un paiement de dividende" (1845).


"Un paiement de dividende"
lithographie originale de Honoré Daumier publiée pour la première fois dans le Charivari du 6 mai 1845.
Épreuve sur blanc avant la lettre (très rare)
Seulement quelques exemplaires (3 exemplaires selon la BNF)
Collection B. H.-R.


Voici une lithographie qui a pour tout signe distinctif un numéro dessiné dans la planche : 750

C'est dans le Daumier Register de Dieter et Lilian Noack qu'il faut aller chercher si l'on veut trouver des informations fiables sur cette lithographie. Je vous invite d'ailleurs à visiter le site de ces collectionneurs entièrement dévoués au culte de Daumier. Comme ils l'indiquent eux-mêmes, le Daumier Register est "le nouveau catalogue raisonné sur internet qui offre des informations détaillées et au moins une photo de chacune des 4.000 lithographies de Daumier. Auparavant, dans le secteur de l'art il n'était pas possible de consulter un catalogue raisonné sur internet. Avec les fonctions de recherche on peut maintenant identifier chaque lithographie de Daumier." Et ce catalogue en ligne s'avère très utile et très agréable à consulter. On ne peut que féliciter ces deux collectionneurs passionnés pour le travail accompli mis gratuitement à la disposition de tous.

Daumier Register. Fiche de la lithographie 750 (numéro de la pierre)


Ce site est construit sous la forme d'une base de données interrogeable selon plusieurs critères, tous judicieux, tous aussi intéressants les uns que les autres. En effet, vous pouvez rechercher une lithographie dans le catalogue en ligne selon les critères suivants :

- Explorer les Catalogues raisonnés Publication
- Chercher par Date ou Exposition Collections
- Provenance
- Technique
- Titre de série
- numéro de planche
- Sujets
- Numéro de la pierre
- Recherche dans le Texte ou Titre des planches
- Feuilleter dans le Daumier-Register (DR) entier

Vous avez aussi une section des lithos proposées à la vente par ces deux collectionneurs.

Dans le cas présent je n'ai à disposition que le numéro dessiné dans la planche comme je l'ai indiqué plus haut : 750

Fiche de la lithographie n°56 - DR 1143


Si vous effectuez une recherche dans le moteur "Numéro de la pierre" (car ce numéro est le numéro de la pierre lithographique), vous obtenez le résultat escompté. On obtient ainsi 2 numéros du DR, 1143 et 1144. Une photographie de chaque lithographie nous est présentée. Chacune correspond à une fiche complète et détaillée. Ainsi, en cliquant sur "Tous les détails" vous pouvez obtenir de nombreuses informations : détails techniques (taille, ici 219 x 240 mm et lithographie) - détails de série : cette lithographie appartient à la série "Les beaux jours de la vie" et c'est la planche n°56 - détails de publication : cette planche a été publiée le 6 mai 1845 dans le Charivari et la série complète a paru entre 1843 et 1846 - détails de collection : indique le nombre d'états connus ou référencés dans Delteil et dans le DR, ici 2 états, et les collections connues, publiques ou privées dans lesquelles on les retrouve - détails des états : cette lithographie est connue en 2 états avec la lettre et 1 seul état avant la lettre (avec ici la mention "très rare") - détails d'impression : donne le nom et l'adresse de l'imprimeur, ici chez Aubert et Cie place de la Bourse à Paris, donne également le numéro de la pierre - enfin, détails sur la background qui est l'historique de la série à laquelle la planche appartient (voir ci-dessous pour cette planche).

Fiche de la lithographie n°56 - DR 1144


Que demander de plus ? Ce catalogue en ligne est une mine ! Une mine précise, détaillée et illustrée. Elle comble le collectionneur de lithographies de Daumier.

Cette lithographie prise pour exemple nous permet de vous montrer tout ce dont ce catalogue est capable. Voici les informations relevées pour cette lithographie.

Lithographie intitulée "Un paiement de dividende", mesurant 219 x 240 mm, faisant partie de la série Les beaux jours de la vie, planche portant le n°56, publiée pour la première fois dans le journal Le Charivari le 6 mai 1845, il existe de cette lithographie des tirages "papier journal" (avec texte imprimé au verso, c'est le tirage courant sur papier mince), des tirages sur blanc, tirages sur blanc avant la lettre (très rare), des tirages sur blanc colorié, un tirage sur papier mince avec texte manuscrit (exemplaire de l'imprimeur, sans doute unique ?), cette planche a été publiée et imprimée chez Aubert et Cie, place de la bourse à Paris.

Voilà qui est on ne peut plus complet et précis !

Pour le plaisir de la découverte voici le background donné par le DR sur cette série :

"LES BEAUX JOURS DE LA VIE - Série composée de 101 lithographies numérotées (et non 100, comme décrit par Hazard et L. Delteil). La planche 56 existe deux fois (légèrement changée) parues dans LE CHARIVARI entre décembre 1843 et septembre 1846. A PROPOS DE CETTE SÉRIE - En dehors des représentations politiques, cette série est probablement l'une des présentations de genre les plus importantes de l'époque par Daumier : le citoyen qui voit publié son propre portrait et semble flotter avec fierté ; l'incompréhension de l'art à l'égard des nouvelles tendances dans la peinture ; les experts vaniteux dans les salons d'art, mais aussi les conséquences de l'industrialisation. Le Charivari a rapporté dans ses éditions sur trois pages sur les événements de la journée, tandis que le quatrième page a été réservée à une caricature de ces événements quotidiens. On y rencontre presque toutes les petites vanités et les mésaventures du petit-bourgeois de cette époque. Le chemin de fer, un symbole du progrès, a donné lieu à ce que nous appelons aujourd'hui le tourisme. Les visiteurs sont arrivés par train de toute l'Europe et, à l'horreur des parisiens, également de la province pour visiter la capitale et de ses expositions. Le "Shopping" était à la mode et des grands magasins ont été construits. Des lieux comme Barbizon étaient devenus des colonies d'artistes grâce à l'accessibilité par le train, et il devint possible pour les parisiens de faire des excursions vers des endroits éloignés en Bretagne ou en Normandie. L'infrastructure d'hôtels et de restaurants s'est développée lentement, et par conséquent les touristes ont souvent eu des problèmes de logements. Le "dîner prix fixe" a été créé et a comme résultat des effets sur la santé souvent négatifs sur les consommateurs en raison de son prix bas. L'ingéniosité des cuisiniers de présenter le chat comme viande de lapin semblait sans limites. Daumier a été en mesure d'identifier toutes ces petites mésaventures et ruses qu'il avait observées chez ses concitoyens."

Nous sommes donc ici en présence d'un état "très rare". Cette lithographie a pour légende : " - Excusez!.. ils font annoncer dans tous les journaux que la société d'assurance du Capricorne est en mesure de payer un premier dividende, et ils ne préviennent pas que le dividende est de trente sous par action!.... Prenez-donc un fiacre; je n'ai même pas de quoi donner le pour boire à mon cocher!..."

le DR nous dit que cette planche existe deux fois, légèrement changée entre DR 1143 et DR 1144. L'état avant la lettre que nous avons présenté ci-dessus semble être DR 1144 mais sans certitude. On relève en effet quelques similitudes de traits qui ne se retrouvent pas dans DR 1143.

Je n'ai pas trouvé d'exemplaire aquarellé gommé de cette lithographie même si on sait qu'elle existe. Je ne peux donc vous la montrer pour le moment dans cet état très attrayant. Je le ferai dès que possible... (néanmoins les amateurs-collectionneurs des lithographies de Daumier privilégient toujours les épreuves en noir).

Je vous invite à vous reporter à l'excellent site internet qui avait été fait pour l'Exposition Daumier à la BNF. Vous pourrez y lire notamment le très beau texte de Charles Baudelaire sur Daumier. De très nombreuses reproductions de lithographies de Daumier vous sont proposées dans une très belle qualité.

On lit dans le catalogue de l'exposition Daumier édité par la BNF cette année, à la page 153 : "Avant la lettre : (...) Le tirage du premier état avant la lettre n'excédait pas trois exemplaires. La beauté des noirs veloutés caractérise ces toutes premières impressions qui permettent d'apprécier pleinement le génie du lithographe." C'est le cas de cette lithographie qui présente bien ces caractéristiques de noirs intenses. S'il est vrai que le nombre d'épreuves de ce type n'excède pas trois exemplaires, alors il en reste deux à trouver...

Je ne sais pas si la BNF possède un exemplaire de cette lithographie avant la lettre... s'il nous lisent... je serais curieux de savoir.

Bonne journée,
Bertrand Bibliomane moderne

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