vendredi 31 mai 2013

Qui pourrait m'aider à identifier le possesseur de cet ex libris de la première moitié du XXe siècle ?


Qui pourrait m'aider à identifier le possesseur de cet ex libris de la première moitié du XXe siècle ?

Bonne soirée,
Bertrand

jeudi 30 mai 2013

De la débibliophilisation du bibliophile ... ou petit addenda lexicologique au Lexique du (dé)Bibliophile moderne


Nature morte bibliophilique ...


Débibliophilisation n. f. Action de débibliophiliser, de rendre débibliophilique.

Débibliophiliser (Se) v. pr. Action de se défaire de la passion bibliophilique.

Débibliophilisatoire adj. Qui provoque la débibliophilisation.

Débibliophilisant adj. Qui ôte toute envie bibliophilique.

Débibliophilisé part. p. Se dit d’une personne qui a perdu toute croyance en la bibliophilie ou qui est en train de la perdre.

Débibliophilique adj. Se dit d'une personne ou d'une chose qui amène à la débibliophilie.

Débibliophile n. m. ou f. Osera-t-on seulement le définir ?

Evidemment toutes ces définitions restent valables en supprimant le préfixe à toutes ces locutions et en leur donnant alors un sens tout opposé. La vie n’étant faite que de contraires et de semblables, je vous laisse y retrouver vos petits !

Bonne journée,

Bertrand

lundi 27 mai 2013

Ballade Aldine by Textor


Quitte à faire un pèlerinage pour se recueillir sur les lieux saints, j’ai choisi Venise, la Sérénissime, ses palais aux vastes portiques, ses canaux, ses marbres, et son temple de la typographie : l’imprimerie des Alde. Venise n’est pas si éloignée, c’est la destination d’un long week-end : une heure et demie d’avion suivie d’une heure de vaporetto. Evidemment, il serait préférable de prendre une caravelle au départ d’Aigues-Mortes mais c’est plus long : il faut attendre une crue centenaire et il y a seize jours de voyage.


Fig 1 L’ancre aldine invite au voyage


Le bateau arrive sur le quai des Slavons (Riva degli Schiavoni) ; le premier hôtel qui se présente est l’hôtel Danieli, jouxtant le Palais des Doges. C’est là qu’il faut descendre : d’une part il est bien situé au centre de la ville, et d’autre part, il a trouvé refuge dans le Palais Dandolo du XVème siècle qui permet de se plonger immédiatement dans l’ambiance et l’époque des incunables, façon Songe de Poliphile. Demandez une chambre avec vue sur la Lagune, elles sont plus grandes.


Fig 2 Un Salon du Danieli



Fig 3 Alde Manuce le vieux toujours omniprésent à Venise


C’est là que les choses sérieuses commencent et qu’on regrette de ne pas avoir préparé suffisamment son voyage. Ne croyez pas qu’il suffit de sauter dans une gondole en lançant « Manuzio ! Manuzio ! », car c’est le plus sur moyen pour que le gondolier vous emmène dans un atelier de soufflage du verre, croyant avoir compris : « Murano Glass ! Murano Glass ! ».

Il faut donc se documenter un peu : Avant d’avoir été Alde l’Ancien, Theobaldo, dit Aldo pour les copains, avait été un jeune étudiant en lettres classiques, apprenant le latin dans le Latium et le grec dans les restaurants à moussaka de Ferrare. Il se destinait à l’enseignement et voulait devenir riche et célèbre. Si une chose l’agaçait par-dessus tout, c’était bien la piètre qualité des manuscrits qui lui était donnés de lire. Les moinillons-copistes étaient aussi distraits qu’ignorants et les textes en circulation truffés de fautes. N’avait-il pas lu dans le De Bello Gallico un passage où César, triomphant au stade, lança au peuple : « Je vous ai compris ! » avant d’affranchir le rubicond ?

L’imprimerie aurait pu pallier ces défauts mais les imprimeurs affairistes ne cherchaient que la rentabilité immédiate sans souci d’honnêteté intellectuelle. Le dominicain Filippo di Strata s’en plaint amèrement au Doge Niccolo Marcello : «  les imprimeurs ne sont que des fainéants, des domestiques chassés aussi ignorants qu’ambitieux, qui passent leurs journées dans les fumées de l’ivresse à rêver de profits fabuleux, des intrus venus d’Allemagne pour priver d’emploi les honnêtes copistes italiens. Ils donnent un mauvais ton à la vie intellectuelle. La ville est maintenant remplie de livres au point qu’on ne peut plus faire trois pas dans la rue sans s’en faire proposer des brassées entières, comme chats en poche, pour deux ou trois sous. Les textes imprimés sont désespérant d’inexactitudes car préparés par d’ignares imbéciles et jamais corrigés. L’existence de ces imprimeurs suffit à faire disparaître du marché les bons manuscrits et encourage les sots à se donner des airs de savants ». Heureusement que frère Filippo n’a pas connu Wikipédia !

Alde n’était pas loin de partager cet avis radical. Il fit le projet de partir pour Venise, capitale mondiale de l’imprimerie, pour fonder sa propre officine. C’est alors que tomba à pic de la Mirandole qui finança son projet (Alde était le tuteur de ses neveux). Il débarqua à Venise en 1490 et jeta l’ancre (sic !) dans le quartier San Stae. La première édition sortie de ses presses date de 1494, le temps d’installation avait été long. Il faut dire que l’entreprise coutait cher et d’ailleurs Alde n’avait que 10% de l’affaire  et ses associés, Pierfrancesco Barbarigo (fils de Marco et neveux d’Agostino, tous deux successivement Doges de Venise) et Andrea Torresano di Asola, élève de Nicolas Jenson, le reste du capital.

Si Alde Manuce n’était pas le propriétaire de l’imprimerie, son génie consistait à savoir bien s’entourer : un typographe coléreux, Francesco Griffo, le véritable inventeur des caractères aldins, des correcteurs et des érudits tels qu’ Alberto Pio ou Pietro Bembo, qui fut l'artisan des éditions de Pétrarque et de Dante, ou encore Giorgio Valla, le franciscain Urbano Valeriani, l'anglais Thomas Linacre qui participa à l'un des rares textes purement scientifiques imprimé en 1499,  et aussi des experts grecs employé à collecter et relire les textes classiques. Alde profita de l’importante communauté grecque exilée à Venise depuis la prise de Constantinople par les turcs. En 1500, tous ces érudits fondèrent l’Académie Aldine, qui se consacra à la publication de la littérature grecque.

Sachant tout cela, il restait à retrouver l’atelier. Quand on connait tant soit peu le labyrinthe des rues de Venise, on se dit que la tache allait s’avérer difficile. C’est un peu par hasard au détour d’une ruelle étroite que je suis tombé sur le Rio Terà Secondo, juste au niveau de l’imprimerie recherchée. (En sortant de la Calle del Scaleter, bien prendre le Rio Terà Secondo sur votre gauche, car à droite le Rio Terà arrive en impasse sur le Rio San Boldo). Sur la plaque de la maison du N°2311, l'inscription : "MANUCIA GENS ERUDITOR NEM IGNOTA HOC LOCI ARTE TIPOGRAPHICA EXCELLUIT" vous confirme que vous touchez au but.


Fig 4 La maison d’Alde Manuce



Fig 5 Une première plaque en italien



Fig 6 Les touristes ne manquent pas de photographier la maison


Le palais est caractéristique des demeures patriciennes du XIVème siècle avec ses hautes fenêtres vénéto-gothiques. Il est émouvant de penser qu’Alde accueillit en ces lieux son ami Erasme, venu préparer une nouvelle édition des Adages, publiée en 1508. Par la suite, c’est Jehan Grolier qui franchit cette même porte pour visiter l’atelier, en 1512. Les éditions aldines représentent 119 titres en 134 volumes dans la collection de Grolier, dont plusieurs Songe de Poliphile. L’instant a été immortalisé par le peintre François Flameng (bien plus tard !).

Aujourd’hui la porte est close et le palais ne se visite pas, mais il est sans doute préférable de ne pas entrer de peur de ne pas y retrouver les presses, les manuscrits et les reliures.

Ceci dit, en collant l’oreille contre le battant de la porte-cochère en bois, j’ai entendu distinctement le grincement de la vis et les cliquetis de la frisquette sur le tympan, c’est le De Aetna qu’on imprime en ce moment, c’est sur…


Fig 7 Les baies gothiques du premier étage


Fig 8 Une autre plaque commémorative en latin

Bonne Journée

Textor

jeudi 23 mai 2013

Identifier le possesseur d'un ex libris de la fin du XIXe siècle.


Ex libris gravé à l'eau-forte (86 x 65 mm)
avec la devise "BIEN OU PAS" Paris 1834 - 19..34 ?


Qui saura nous dire à qui appartenait ce bel ex libris non signé mais néanmoins joliment gravé à l'eau-forte et pointe sèche. Un Chiffre, une Devise, Paris, 1834, un Bibliophile vraisemblablement né en 1834 qui pensait sans doute finir centenaire ..., le tout apposé dans un livre imprimé en 1892.

Merci d'avance,

Bonne journée,
Bertrand

mardi 21 mai 2013

Revue de presse : Le cri de désespoir du capitaine Dreyfus vendu aux enchères (L'Alsace.fr du 19 mai 2013)


Ce 29 mai, à Paris, sera adjugé au plus offrant un document qui vaut autant par son intérêt historique que par la détresse qu’il révèle : il s’agit d’une lettre d’un des Mulhousiens les plus malheureusement célèbres, le capitaine Dreyfus, écrite depuis un cachot de l’île de Ré un mois seulement après sa condamnation.

Ce sont des feuilles un peu jaunies, emplies d’une écriture parfaite, sur la forme comme sur le fond, empreintes de ce style appliqué qui était celui du XIXe siècle. Fine, soignée, sans une rature, la calligraphie paraît ressembler à toutes celles de l’époque ; elle fut pourtant considérée comme la preuve singulière de la haute trahison de son auteur. La feuille a un en-tête : « Dépôt de Saint-Martin-de-Ré ». Juste en dessous, et juste avant que ne débute la lettre proprement dite, sont notés une date (le 26 janvier 1895), un numéro d’écrou (8.154) et enfin le nom du prisonnier qui prend ici la plume : Alfred Dreyfus.

Juif mulhousien en passe de devenir le symbole de l’injustice et de l’antisémitisme, Alfred Dreyfus a alors 35 ans. Il écrit ce courrier un mois après sa condamnation et trois semaines après sa dégradation. Il est arrivé dans l’île de Ré le 17 janvier 1895, menotté et les fers aux pieds. À sa descente du train, à La Rochelle, il a été insulté ; des personnes, dit-on, ont crié « À l’eau ! Mort aux traîtres ! Mort aux juifs ! »

Dans sa cellule, à ce moment-là, il ne reçoit aucun courrier, n’a le droit de parler à personne, est fouillé chaque jour. On ne lui autorise qu’une feuille de papier deux fois par semaine, accompagnés d’une plume et un crayon à restituer aussitôt après usage.

Cette lettre admirable est restée sans réponse.

C’est dans ces conditions qu’il écrit au ministre de l’Intérieur. Il y proteste de son innocence, révèle qu’il a pensé se tuer et ne demande que deux choses : de la justice et « du travail » (lire ci-contre). Cette lettre admirable est restée sans réponse. Elle a sans doute une importance historique, mais elle est surtout remarquable par l’humanité qu’elle contient, cette souffrance retenue, mais éclatante. C’est le cri de désespoir d’un homme qui veut rester digne, envers et contre tout. Alfred Dreyfus lui accordait une certaine importance puisqu’il en reproduira le texte intégral dans son journal, Cinq années de ma vie , paru en mai 1901.

« Il n’avait pas la possibilité de faire de brouillon : il a dû penser entièrement cette lettre avant de l’écrire , fait remarquer Anne Heilbronn, directrice du département Livres et manuscrits de Sotheby’s, à Paris. Or la langue est admirable ! Moi, j’ai été transportée… »

Cette société de ventes aux enchères (la plus ancienne au monde) adjugera cette lettre au plus offrant ce mercredi 29 mai, au milieu de bien d’autres trésors (lire ci-dessous). Son propriétaire actuel reste anonyme ; il l’avait acquise en 1996 dans une librairie de Saint-Germain-des-Prés, à Paris. En 1940, le petit-fils du capitaine avait confié cette lettre à la Bibliothèque nationale de France, pour la mettre à l’abri ; elle avait été restituée à la famille après la guerre.

« Il est quand même assez rare que l’on propose des documents d’une telle importance historique , commente Anne Heilbronn. La dernière fois, c’étaient les brouillons d’articles et de discours de Robespierre, en mai 2011. L’ensemble des manuscrits avaient été adjugés pour 900 000 €… » Là, l’estimation va de 100 000 à 150 000 €, ce qui est beaucoup évidemment, mais peu aussi si l’on compare avec les autres estimations des lots mis en vente le même jour. « On aurait pu mettre zéro, c’était pareil, je pense que ça partira dans ces prix-là, annonce la directrice. Des privés comme des administrations peuvent être agités… J’ai l’impression que ça s’adresse à tout le monde : c’est l’Histoire de France ! »

Publié sur L'Alsace.fr le 19/05/2013 à 05:00 Textes : Hervé de Chalendar http://www.lalsace.fr/actualite/2013/05/19/le-cri-de-desespoir-du-capitaine-dreyfus-vendu-aux-encheres

lundi 20 mai 2013

A votre avis, de qui est ce texte ciselé à la perfection au coin du bon sens ?




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Un esprit très aiguisé et à la fois très bienveillant, — ce qui se rencontre, par aventure, — s'étonnait, l'an dernier, en parlant du volume de la Vie à Paris, que nous eussions pu citer tant de noms, en ces pages, sans soulever ni protestations ni colères. Le fait est qu'il semble très difficile, pour ne pas dire impossible, de parler des gens sans les blesser. Et pourtant quoi de plus aisé ? Il suffit tout simplement d'être poli. La politesse en littérature passe, il est vrai, souvent pour une certaine faiblesse. De même que, pour les femmes, un homme qui tire l'épée est nécessairement un brave, et un homme qui joue de la guitare ou du piano est nécessairement un poète, pour les hommes un écrivain poli, bienveillant ou dédaigneux, — car la bienveillance est aussi une des formes du dédain, — est fatalement un être désarmé. J'en causais hier avec un des plus affinés parmi les plus célèbres de ce temps. Il était tenté d'écrire un Essai sur la Politesse Littéraire. Mais quoi ! L'essai est chose usée et démodée, aussi passée de mode que la politesse elle-même ! Je sais cependant bien des gens, et non des moindres, qui ne renonceraient pas facilement à se montrer polis, dussent-ils être taxés de faiblesse par les goujats. On n'est point faible inévitablement parce qu'on est bien élevé et qu'on croit plus digne de faire son chemin en allant tout droit, qu'en marchant lourdement sur les pieds des autres. Je n'ignore pas non plus que, lorsqu'on écrase quelques cors, on fait retourner les gens et on court la chance heureuse de devenir le centre d'un attroupement qui fait accourir les badauds. Mais tout être un peu fier doit, je pense, mesurer à sa juste valeur le bruit produit par la badauderie. Un rustaud qui déchirerait le tapis en entrant dans un salon se ferait sûrement remarquer. Mieux vaut n'être point remarqué et ne pas déchirer le tapis. Faire du bruit est, au temps présent, le divertissement le plus facile que je connaisse. Il suffit de se promener avec un gong et d'en assourdir les passants. Celui qui, du jour au lendemain, voudra devenir célèbre n'a qu'à user de ce moyen, qui n'est pas fort cher. Je m'étonne, en vérité, qu'avec cette boulimie de renseignements que le public éprouve lorsque surgit, du soir au matin, une personnalité, — « champignon poussé en une nuit », disait le marquis de Mirabeau, — quelque affamé de gloire un peu pressé ne se donne point cette volupté de se dévêtir, un soir de première représentation, devant « tout Paris », comme on dit. Le lendemain, il sera célèbre et, pour peu que le garde municipal le pousse devant lui, en l'arrêtant, il sera populaire. On a vu, sous bien des régimes, des ministres avoir un passé moins glorieux à leur actif. Eh bien, en dépit de cet amour forcené du bruit, du tapage, de la réclame, du scandale, de tout ce qui est la maladie endémique de notre pays, je connais nombre de gens qui aiment encore le calme, la probité littéraire, la politesse et le goût. Ce sont tout simplement des esprits français demeurés très français au milieu de l'envahisse- ment yankee et de la Courtille étrangère qui nous assourdit de son internationalisme. C'est pour ceux-là que j'écris et rien ne m'est plus doux, je l'avoue, que l'envoi d'une lettre de ces lecteurs du Temps qui me disent : « Je vous ai compris. » Cela console un peu des basses injures de quelques malotrus ou, parfois — car tout homme a des ennemis inconnus — des lettres anonymes de lâches. Je n'ai jamais oublié les recommandations que me fit, voilà vingt ans, un écrivain des plus remarquables, qui vit toujours et me rencontra, en ce temps-là, dans un bureau de journal où je portais timidement mes premiers manuscrits. « — Ne soyez pas timide, me dit-il. Dans un temps livré aux audacieux et aux farceurs la timidité n'est plus une vertu. Si vous ne vous sentez point le courage, qui est grand, de braver, après les déboires du début, les épreuves du succès, restez au coin de votre feu parmi vos livres ou faites le métier de votre père et n'écrivez que pour vous- même. C'est le plus rude des états que celui d'écrivain et le plus calomnié par ceux-là mêmes qui le devraient honorer et qui l'avilissent. Si vous n'êtes pas disposé à harasser votre corps et à torturer votre esprit à la recherche d'une idée, d'une phrase, d'un roman, d'une comédie, d'un article même — car il y a souvent tout un livre dans un article de journal ; — si vous n'avez pas autour de votre poitrine le « triple airain » dont parle Horace ; si vous ne savez pas que la vie littéraire est une lutte d'Indiens Pawnies, une bataille autour d'un peu de gloire ou d'un peu de pain, une poussée farouche où l'on s'entre-déchire comme des cannibales et où le vert laurier de tout vainqueur est rouge des gouttelettes du sang des vaincus ; si vous  ne vous imaginez pas que l'existence de l'homme de lettres est celle du manœuvre penché sur son papier comme le carrier sur son bloc de grès ; si vous croyez que la vie de Paris est pour le littérateur, composée de visites au foyer de la danse et de lippées joyeuses après les premières à tapage, ne vous donnez point la tristesse d'une désillusion et renoncez à ce collier de misère. Mais s'il vous plaît de braver courageusement, avec le gai sourire de notre race, les jours difficiles, les travaux qui courbent l'épine dorsale et font couler la cervelle jusqu'au bout du bec de plume ; si vous vous sentez assez fort pour narguer la niaiserie des sots, la rage des envieux, la calomnie des rivaux, alors en route et haut votre cœur ! « Cherchez, luttez, étudiez, voyez, vivez, travaillez. Puis, après des années et des années de labeur, lorsque votre existence sans compromissions vous donnera le droit de parler de votre loyauté littéraire ; quand vous aurez dépensé votre  jeunesse à plaider la cause du droit, à parler de pitié aux égoïstes d'en haut et de devoir aux révoltés d'en bas ; quand vous pourrez vous rendre cette justice que, dans votre œuvre, il n'est rien qui puisse avoir corrompu une âme et jeté un corps au mal ; quand vous aurez consacré vingt ans de votre vie à faire aimer ce qui est beau et à célébrer ce qui est bien, — l'art, la bonté, le courage, l'honnêteté, la patrie, — alors attendez-vous à rencontrer les moustiques et les maringouins dont parle Beaumarchais, les ennemis qui vous connaissent et les imbéciles qui vous méconnaissent, les jaloux qui supputent la somme de vos labeurs, et les paresseux qui regardent comme une part à eux volée le travail qui vous plaît et qui est, avec votre joie, votre pain du jour. Attendez-vous à entendre calomnier chaque action de votre existence et chaque page de votre œuvre. Produisez-vous peu ? C'est impuissance. Beau-coup ? C'est incontinence. Vous outragez, en tra-vaillant, tout ce qui ne travaille pas. Toute œuvre qu'achève un homme a contre elle tous ceux qui ne l'ont pas faite. Vous criez au pessimisme ? Il n'y a pas de pessimisme ici, il y a la constatation pure et simple d'un fait. Et habituez-vous de bonne heure aux piqûres des frelons et au venin des vipériaux. Prenez le poison chaque matin, comme Mithridate. Quand on y est fait, l'arsenic, dit-on, n'est plus redoutable. Faites-vous d'ailleurs ce raisonnement qu'on n'insulte que ce qui s'élève et que toute insulte ne part que de très bas. La calomnie est une des preuves du succès. « Quand « on me dit, » — a raconté Victor Hugo : « Vous « êtes « éreinté aujourd'hui dans tel journal ! » je réponds (c'est Victor Hugo qui parle) : « Laissez-moi « croire, pour mon orgueil personnel, que je suis « insulté et éreinté, comme vous dites, dans plus a d'un journal à la fois ! » Il est des gens qui font ce métier-là. Métier facile. Ne le faites pas. Il est peu lucratif d'abord, et la bave ne nourrit point son homme. Et puis il est vilain, des plus vilains. Surtout ne répondez jamais à ces hurleurs : ils n'en valent point la peine. Ce sont des déclassés ou des ratés, des jouisseurs impatients ou des bohèmes vieillis. On aperçoit leur vanité et leur envie à travers les trous de leurs chaussures ou les boutonnières de leurs gants, car quelques-uns ont des gants. Vireloque a pour compère l'Arétin. Tels sont mes conseils à vous qui débutez. Pour moi, je me suis imposé une règle fixe en prenant la plume. On peut parler de moi librement puisque je prends le droit de librement parler des autres. Je ne reconnais à aucun insulteur la possibilité de m'atteindre. Qui calomnie grandit le calomnié ; qui outrage se salit. Le journalisme est le plus vil des métiers quand il n'en est pas le plus honorable ; mais je remarque qu'ailleurs qu'il ne pourrait pas plus défaire la réputation d'un honnête homme qu'il ne saurait, même après des années de tentatives, assurer quelque estime à un gredin. Le public, en fin de compte, n'est pas si niais qu'il prenne longtemps au sérieux les marchands d'injures et les crieurs de calomnies. « Je vous le répète donc ; n'ayant causé aucun préjudice à personne, ma vie appartient à tout le monde après avoir été consacrée à rendre plus d'un service à quelques-uns. Ce qu'on dit de moi m'importe peu ; je ne m'inquiète que de ce que je dis des autres. Sur ce point, encore une fois, je m'efforce de ne point blesser, trouvant odieuses les personnalités haineuses, et basses les petites allusions perfides. Que mes ennemis (à lire certains parleurs, je pourrais avoir la fatuité de croire que j'en ai), oui, que mes ennemis sachent en quel complet mépris je tiens leurs insultes. Je ne dis pas que je m'en honore : cela est tout simple. Je dis que je les dédaigne. La réputation d'un homme ne dépend nullement, je le répète, de ce que disent de lui trois ou quatre grimauds, mais tout simplement de ce qu'en pensent les honnêtes gens. Et si, dédaignant les attaques, je puis avoir atteint quelqu'un, je serai toujours à sa disposition pour effacer le coup de plume si j'ai blessé involontairement, ou pour souligner le mot d'un coup d'épée s'il a été écrit avec intention. Je trouve du reste parfaitement inutiles et souvent absurdes les duels littéraires. Mais s'il est permis de mépriser qui outrage, c'est à la condition seule qu'on appartiendra à celui qu'on aura blessé. Au total, voici ma profession de foi : je n'appartiens pas à qui parle de moi, mais j'appartiens à celui dont j'ai parlé. C'est une simple règle de courtoisie et je ne sais rien de plus galant et de plus français qu'un homme qui se pique d'être courtois, surtout au moment où presque tous les gens ne le sont plus. » J'ai souvent pensé à cette mercuriale de mon vieil ami. Je n'en ai oublié aucun trait et, maintenant que j'ai presque l'âge qu'il avait alors, je la répéterais volontiers à tout débutant qui me viendrait demander conseil. « Bien faire, laisser dire et ne rien dire qu'on ne soit prêt à soutenir jusqu'au bout. Etre poli, respecter les gens qui ont du talent, aider ceux qui en auront peut-être et mépriser ceux qui, en injuriant et grossissant la voix, croient en faire montre. Laisser parfois le papier blanc pour endosser la veste d'escrime et quitter la plume pour le fleuret, qui est un excellent instrument de gymnastique et peut, au besoin, tenir lieu d'un ami. Ne blesser personne volontairement et rire des blessures qu'on essaye de vous faire. » C'est la règle de conduite hygiénique et morale que me dictait mon ami d'il y a vingt ans. Elle m'a constamment tenu en haleine et, — malgré bien des tristesses, — en bonne humeur, après tout, et comme en jeunesse. C'est pourquoi je la crois excellente, je la recommande aux autres et continuerai à la pratiquer pour moi-même. Un proverbe danois dit avec raison : « L'homme d'honneur ne s'embarrasse ni des louanges ni des injures ! » Que l'école du scandale se le tienne pour dit. Ici l'on s'amuse, ici l'on juge les hommes, on feuillette les livres, on étudie la vie de Paris, on en saisit, au passage, les folies ou les ridicules : - ici l'on raille ; mais ici l'on n'insulte pas.

* *
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La réponse demain si personne n'a trouvé.

Bonne journée,
Bertrand

lundi 13 mai 2013

Une gravure inédite de Louis Morin ? Quel livre ? Louis Morin en questions.


Je viens d'acquérir une petite pépite comme j'aime. Il s'agit d'une estampe (eau-forte ? pointe sèche ?) d'après le dessin de Louis Morin. Gravée par ? Je ne sais pas.
Cette estampe a été tirée sur papier Japon épais (feuille de 29 x 23 cm) et le dessin mesure 19,5 x 14,5 cm environ. Au bas de la gravure on peut lire, écrit à la mine de plomb : "essai pour M. L. Morin // qui n'a jamais paru"

Mystère et boule de gomme ! D'où peut bien sortir cette épreuve, peut-être préparée pour un livre, qui n'a jamais paru ?

Si quelqu'un a une idée, je suis preneur, et sans doute aussi tous les lecteurs du Bibliomane moderne.

Octave Uzanne a consacré une belle étude à Louis Morin dans l'Art et l'Idée (1892). CQFD.

Bonne journée,
Bertrand

vendredi 10 mai 2013

Appel à tous. Pouvez-vous identifier ce sceau? A-t-il appartenu au jurisconsulte François Hotman (1524-1589) ? (le blog de Pierre Bouillon)


Chers lecteurs, je fais appel à vous pour identifier ce sceau qui est dans un de mes anciens dictionnaires. Le dictionnaire qui porte ce sceau (*) a été imprimé à Paris, en 1539, chez Robert Estienne. Je devine, en haut, un animal, qui ressemble à un chien, debout, deux pattes portées vers l'avant. À gauche, deux lettres, probablement un F et un H. À droite, une lettre, sans doute un V. Dans la moitié inférieure du sceau on voit blason qui a la forme d'une lyre avec en haut un signe en forme de V. Pourriez-vous m'aider?

Ajout du mercredi 8 mai. Une piste !

Une recherche que j'ai faite pour trouver des personnages de renom de la France du XVIe siècle dont le prénom commence par un F et le nom par un H me mène à une hypothèse. Le sceau est peut-être celui de Francois Hotman, célèbre jurisconsulte, né à Paris en 1524 et mort à Bâle en 1589. J'ai vu qu'il a publié, en 1554, chez Robert Estienne justement, un Commentariorum in Orationes Ciceronis. Et, tenez-vous bien, François Hotman a publié, en 1560, un pamphlet, "Épistre envoyée au Tigre de la France", où il dénonçait les excès du cardinal de Lorraine. Ce n'est peut-être pas un chien mais plutôt un "tigre" rétif et encaqué qu'on voit sur le sceau. Si cette piste devait s'avérer, l'exemplaire de cet ancien dictionnaire du XVIe siècle, que je vous présenterai sous peu, aurait donc une provenance exceptionnelle.

Vous pouvez laisser un commentaire ici ou vous pouvez m'écrire directement à : pierrebouillon1@gmail.com

(*) Je présenterai ce dictionnaire dans un prochain article.

Transmi avec l'accord de Pierre Bouillon, notre ami de l'ancienne France, son blog : http://www.pierrebouillon.com/

Merci d'avance pour lui

Bonne journée,
Bertrand

jeudi 9 mai 2013

Que pensez-vous qu'il faudrait pour améliorer le déficit d'image de la bibliophilie (et par ricochet de la librairie ancienne) ?


Que pensez-vous qu'il faudrait pour améliorer le déficit d'image de la bibliophilie
(et par ricochet de la librairie ancienne) ?


La réponse en image dès demain.

* * *
La réponse en image


Evgenia Diordiychuk [Евгения Диордийчук]
(photos by S. Enenko)

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

mercredi 8 mai 2013

De l'amour des livres contrarié (pamphlet).


Une bibliothèque qui en impose ...


Ne vous êtes-vous jamais posé les questions suivantes : Pourquoi tout le monde sait quelle équipe de football a gagné la dernière coupe d'Europe ? Pourquoi tout le monde est au courant du moindre détail des frasques érotico-politiques de l'avant-dernier président du FMI ? Pourquoi lorsque la petite fille d'un célèbre groupe hôtelier sable à la hache des magnum de champagne à 50.000 dollars l'unité sur un yacht à St-Tropez même votre jardinier est au courant ? Pourquoi tout le monde sait que placer de l'argent sur un compte en Suisse c'est mal ? Bref, en un mot, qu'est-ce qui fait courir le monde ? Qu'est-ce qui fait courir l'information au fin fond des chaumières ?

Car demandez autour de vous la date de l'édition originale des Fleurs du Mal de Baudelaire, ou la date de première impression française de Mein Kampf de celui qu'on ne nomme pas pour ne pas avoir d'ennuis avec la censure, et vous serez surpris du résultat !

Il faut dire que depuis la nuit des temps (peut-être pas si loin en fait ...), bibliophilie et populisme ne font pas bon ménage. Parce que c'est bien de populisme culturel qu'il nous faut parler. Comment qualifier autrement les informations flash et trash dont on nous abreuve à longueur de journées ?

Petit exemple pratique. Voici la liste des gros titres de Google actualités de ce jour, mercredi 8 mai 2013, dans leur ordre d'apparition (Google actualités France) :

- Trois morts dans un accident dans le port de Gênes
- Vague d'arrestations après le vol de diamants à l'aéroport de Bruxelles
- Commémorations du 8 mai : Hollande envoie un message d'apaisement à l'Allemagne
- 2 milliards d'euros: c'est ce que coûtent les jours fériés
- Cleveland : les premiers détails de la vie des séquestrées
- Manchester United: Qui pour remplacer Alex Ferguson ?
- Un surfeur tué par un requin à la Réunion
- L'auteur du massacre d'Aurora plaidera non coupable pour démence
- Syrie: Israël ne compte pas intervenir (ministre).

Je m'arrête là car cela devient vite fastidieux et vomitatoire. J'ai envie de dire "à part ça tout va bien !".

Les plus lucides d'entres nous me répondront : il n'y a là que ce que les gens veulent lire, veulent entendre ou veulent voir. Certes. Peut-être. Pourquoi pas. Encore que. Ne serait-ce pas le contraire ? Ne donne-t-on pas à voir, à lire et à entendre ce que l'on veut que nous voyions, que nous lisions et que nous entendions ? Mais alors, qui tire les ficelles ? Qui serait à la tête de ce Big Brother international de l'information ? Quel pouvoir suffisamment énorme permettrait d'arriver à ces fins ? En clair, à qui profite le crime ?
Personnellement, je ne vois qu'une seule réponse possible : Money ! L'argent ! Seul l'argent peut justifier ces luttes de pouvoir à coup de marketing dispendieux pour asseoir une autorité globale suffisamment forte pour écraser tout le reste.

On est loin de la bibliophilie me direz-vous ! Sans doute. On est toujours loin lorsqu'on n'arrive pas à s'approcher des choses assez près pour les sentir.

Mais voici la bibliophilie qui arrive (ou plus exactement l'amour des livres). Je ne distingue pas ici le plaisir de la lecture, la soif d'apprendre au travers des livres et l'acte de bibliophilie à proprement parler "à l'ancienne" qui sous-entendrait une forme d'amour élitiste réservé à certains en raison de la taille proportionnelle de leur portefeuille. Je ne veux parler ici que d'amour des livres, de passion bouquinière, de soif d'apprendre par le texte et de plaisir des yeux par l'image et le support de l'écriture. Rien autre.

L'amour des livres donc. Sa représentativité dans notre société donc. Deux choses bien éloignées des premières pages de Google actualités. Et pourtant ! en grattant un peu, on trouve vite tout ce que l'on veut dans ce domaine grâce à ... Google justement ! Ce ne serait donc pas un problème d'éludement mais un problème de priorité. En clair, l'amour des livres ne passionne pas les foules ! C'est exact, on s'en rend compte tous les jours, par métier et par passion.

Si les matchs de football d'aujourd'hui sont les arènes et les spectacles des gladiateurs d'hier, alors le peuple a des jeux pour se divertir. Ne lui manque peut-être parfois que le pain pour manger, mais cela devient vite accessoire. Le divertissement fait oublier la faim. Et la faim justifie souvent les moyens. Bref, on serait, si l'on s'en tient à ce comparatif sillogistique aux abords d'une fin de civilisation. Est-ce un bien ? Est-ce un mal ? Peu importe, Dieu-Money veille !

Le problème du manque de notoriété de la bibliophilie vient de son déficit d'image, et cela ne date pas d'hier ! Il y aurait plus d'une chose à revoir pour changer cet état de fait qui nuit gravement à la culture ! Evidemment tout le monde ne souhaite pas savoir la date de l'édition originale des Fleurs du Mal, ni même savoir de quoi parle Des souris et des hommes de Steinbeck, et pourtant ! Je reste persuadé que bien des personnes s'intéresseraient à ces choses de plus près si plusieurs éléments déclencheurs venaient à leur être communiqués. Je vais essayer de donner quelques pistes tout à fait personnelles (d'ailleurs, ici, tout est très personnel).

Tout d'abord ne rien interdire à personne. Je veux dire autoriser les accès aux savoirs. C'est à dire ne pas mettre des bâtons dans les roues à ceux qui auraient la curiosité, mais qui, mal nés, ou mal amenés dans le monde, n'ont pas accès ne serait-ce qu'à l'idée qu'ils peuvent savoir des choses que d'autres savent déjà. C'est plus une barrière psychologique qu'il faut abattre qu'autre chose, un mur de Berlin de la Nomenklatura es connaissances. Evidemment, vous me direz, tout le monde ne part pas au départ sur la même ligne. Darwin serait là pour nous rappeler combien la sélection naturelle est importante. Certes. Mais tout de même. Je ne peux pas m'empêcher de penser quand je discute avec un maçon ou un charpentier un peu curieux des choses, qu'il aurait fait, dans d'autres circonstances, poussés par d'autres inspirations, un excellent bibliographe (notez bien qu'il y a des bibliographes qui feraient sans aucun doute d'excellents maçons ... j'en connais !). L'accès au savoir, à l'envie de savoir, à la curiosité est à mon sens le plus important des facteurs de régression culturelle ambiante. Paradoxalement, à l'heure d'internet et de la communication à tout va, l'information n'a jamais été aussi redondante, prédigérée et orientée pour faire du peuple le bon mouton de la ferme d'Orwell.
La confiscation des savoirs. Autre raison majeure de l'incurie généralisée qui se propage. On partage tout aujourd'hui ! Oui, sans doute, mais pas avec tout le monde ! Je vais éviter de revenir sur l'idée de Messieurs les Ronds de cuir et la notion de pré carré ... ça m'exaspère ! Mais l'idée est là et tout le monde la comprend. On ne mélange pas les torchons avec les soviets ! Si vous n'avez pas le cursus universitaire (ou social - ce dernier se substituant parfaitement au précédent à partir d'un certain niveau de compétence fiscale) bien comme il faut on vous fait vite sentir que vous n'avez pas accès à ce que d'autres ont naturellement, presque comme un droit d'aînesse, en libre service : Nomenklatura encore ! Parmi les réseaux (je déteste ce mot) qui grouillent sur la planète, vous n'en n'êtes pas. Faites-vous une raison. On vous y laisse mettre le doigt ; aussitôt on vous fait sentir que la frontière est franchie. Avez-vous un maître ? Avez-vous une référence ? Avez-vous un père spirituel labellisé ? Bref. Le ni Dieu ni Maître n'a pas sa place à la table des grands de l’establishment intellectuel que vous essayez de forcer.
En clair, l'auto-censure et la confiscation des savoirs nuisent gravement à l'épanouissement de l'amour des livres. Je passerai sur les considérations vaguement vénales tels que le confort plus ou moins effectif des fauteuils de tels ou tels libraires sur salon ou en librairie. Je passerai aussi sur l'accueil frigide en librairie réservé à la jeune clientèle encore peu effarouchée et par l'auto-censure (la jeunesse est effrontée) et par la confiscation du savoir (la jeunesse est anarchiste). Je passerai encore sur les mic-mac ou tours de passe-passe qui permettent de comprendre que le milieu de la librairie (ancienne) finalement n'échappe pas au milieu tout court par bien des aspects. Mais il paraît que tout cela ne doit pas être remué car sinon gare aux odeurs. Tout ceci sent parfois assez mauvais, même vu d'assez loin. C'est dire si de près cela doit en avoir toutes les caractéristiques.
Voyez que finalement la bibliophilie ou plus exactement "L'amour des livres" s'insère assez bien et se fond même parfaitement bien dans la société civile.
En conclusion provisoire, que dire ? Que ce ramassis de gros traits, n'en déplaise à l'élite, à la Nomenklature sus-citée, à l’Intelligentsia environnante qui surveille, ne doit pas rebuter l'amoureux des livres, bien au contraire. L'amoureux des livres, des textes, du papier, des reliures, de l'art de faire du beau avec des mots, ne doit céder qu'à sa curiosité, son envie et sa passion pour le savoir. Rien ne s'achète en ce domaine, aucune porte ne se ferme devant l'enthousiasme forcené et aucune censure n'existe pour nuire à l'envie.
C'est donc sur un constat optimiste qu'il faut refermer ce billet et dire le célèbre slogan de 68 : "Mort aux ... !"

Au début je me suis demandé si j'allais oser publier ce petit pamphlet un peu rude, et puis l'évidence vient d'elle-même : pourquoi garder pour soi ce qu'on a pensé dire aux autres ? Alors je partage !

PS : Pour tout vous dire, ce genre de petit billet me sert de pense-bête, alors plutôt que de la garder pour moi sous Word, je vous en fais profiter. J'en ai d'autres sous le coude ...

Bonne soirée
B.

mardi 7 mai 2013

Fiche de libraire : La découverte australe par un Homme-volant ou le Dédale français ; Nouvelle très-philosophique : Suivie de la Lettre d'un Singe, par Restif de la Bretonne (1781)


Voici un livre très connu des bibliophiles et des libraires. On le voit passer suffisamment rarement en belle condition pour qu'on le remarque ici dans cette fiche d'une librairie parisienne.

Exemplaire de reliure demi-veau à coins de l'époque. 4 vol. in-12. 163 x 98 mm.

Edition originale et seule édition de "l'un des ouvrages les plus rares de Restif de la Bretonne" (Rahir).

Exemplaire censuré relié à l'époque, comme la quasi totalité de l'édition originale sans les feuillets 337 à 422 du tome IV.

Explications :

"La plupart des exemplaires ont subi des mutilations exigées par la Police. Restif a dû supprimer absolument les pages 337 à 422, c'est à dire cinq des diatribes qui suivaient celle intitulée l'Homme de nuit, la seule qui ait trouvé grâce devant la censure ... Quant aux feuillets supplémentaires du tome IV, c'est Restif qui les a soigneusement fait disparaître, pour des raisons personnelles ... Cet ouvrage, qui est un des plus rares de ceux de l'auteur, ne fut publié qu'en 1781, et sans doute après des lenteurs et des difficultés de la part de la censure et de la police." (P. L. Jacob, Bibliophile Jacob)


La fiche se poursuit en citant d'autres bibliographes :

"Cet ouvrage est l'un des plus bizarres de Restif et l'un des moins communs. Les récents progrès de l'aviation ont attiré l'attention des curieux sur ce livre que nous croyons devoir augmenter rapidement de prix." (Cohen)

"Cet ouvrage, un des plus singuliers que Restif ait écrits, est fort recherché, non seulement par les rétiviens mais aussi par des collectionneurs de livres sur les utopies et l'aéronautique. "Il est vraiment remarquable, dit Lacroix, que Restif ait porté ses recherches sur la manière de voyager dans les airs, trois ans avant la découverte des frères Montgolfier, qui firent la première expérience des aérostats au mois de juin 1783. "Il est encore remarquable, quoique personne ne l'ait signalé, que Restif, dans cet ouvrage ait prévu un véhicule pouvant rouler sans chevaux. Dans l'intérêt de la paix, il propose une association des nations européennes. Chose encore plus curieuse, Restif, anticipant la société protectrice des animaux, demande qu'on soit juste envers les animaux." (Rive Childs).

"La base du système physique développé dans cet ouvrage est qu'originairement il n'y eut qu'un seul animal et qu'un seul végétal sur notre globe. Ce sont les différences de sol et de température qui ont amené la variété des êtres et produit des animaux mixtes. La description de la machine inventée par Vicrtorin pour s'élever dans les airs, est faite pour intéresser beaucoup de personnes." (Monselet, Restif de la Bretonne, n°22)

La fiche indique encore :

La présente édition est ornée en premier tirage de 4 frontispices, dont 1 sur double-page et de 19 superbes figures fantastiques non signées qui représentent l'homme volant, mais aussi des hommes-singes, hommes-ours, hommes-cochons, hommes-taureaux, hommes-castors, hommes-chevaux, hommes-lions, hommes-grenouilles, etc.

"Quelques-une des figures sont assez libres et expliquent que le livre ait été assez souvent détruit." (Rahir)

En conclusion, le libraire :

"Précieux exemplaire de cette originale recherchée par tous les rétiviens et les amateurs d'anticipation, conservé dans sa reliure uniforme de l'époque."

Prix demandé : 9.500 euros

Bonne journée
Bertrand

lundi 6 mai 2013

Des Etudes et des Lettres. Des Hautes Etudes et de la Haute Bibliophilie.


Aujourd'hui le Bibliomane moderne rase gratis !


Les plus attentifs à ce qui se passe dans et autour du Bibliomane moderne se rendront vite compte que j'ai décidé cet après-midi de supprimer le lien (colonne de gauche) vers un blog dont je faisais gracieusement la promotion depuis des mois. Pourquoi ce geste désinvolte digne du pire des anarchistes me direz-vous ? La chose est fort simple. Quand une personne se conduit comme un malotru, que ce soit au XIXe siècle ou au XXIe, il mérite pour le moins, une petite correction. Et comme au XXIe siècle il n'est plus de mise d'aller sur le pré (de toute façon je n'ai pas de chirurgien sous la main). J'ai tout simplement coupé les liens qui me rattachaient à cet éminent personnage non moins doué d'insignes mauvaises manières. Je n'en dirai pas plus. Chacun reconnaîtra ses petits et les agneaux seront bien gardés (encore réussira-t-on à les tondre ?).
A noter tout de même qu'une fois encore, j'ai la déplorable sensation que Messieurs les ronds de cuir des lettres n'aiment guère que quelqu'un sorti de son champs (je suis un campagnard et je le revendique avec des bottes aux pieds chaque fois qu'il pleut) vienne brouter l'herbe sur le pré carré qu'ils se sont réservé (il faut dire qu'ils sont payés pour cela). Comme me disait encore dernièrement un ami bibliographe amateur de petits formats (amateur ... bouh quel vilain mot) : ces gens-là (ceux qui sont payés pour faire le travail que seule la passion nous commande, à nous, pauvres libres hères bibliographes d'occasion) n'aiment pas qu'on leur marche dessus et pardessus tout apprécient à l'aune de leur ego les fleurs, les couronnes et autres lauriers tressés par la marmaille du parterre qui s'esclaffe : "Ah qu'ils sont beaux ! Ah qu'ils sont intelligents ! ... mon dieu qu'ils sont bêtes !" Fermez la parenthèse (elle se rouvrira bien assez vite).
Bref. L'affaire est enclose comme la rose à peine éclose dirait le poète, et si d'aventure l'ami hautement estudiantin qui se voit là privé d'une réclame fort négligeable, j'en conviens, pouvait se rendre compte à quel point je peux m'esbattre les jumelles de ces professionnels du métier qui me font m'esbailler doucement mais sûrement, alors ce serait une joie de lui en faire conférence, et peut-être même circonférence, bis in idem.

PS : il me fallait bien choisir une illustration pour imager ce billet Hautement bibliophile et si peu discourtois, la voici en grand !

Vale !

Bonne soirée,
Bertrand Bibliomane moderne

jeudi 2 mai 2013

Courrier des lecteurs : une sympathique gravure imprimée en sanguine sur papier de Chine. Mais de qui ?


Bonjour,

J’ai fait l’acquisition d’une sympathique gravure imprimée en sanguine sur papier de Chine représentant une dame ailée s’envolant vers les cieux.

La signature semble être LC ou AC (le a étant renversé) ou ZC. Cela pourrait ressembler à du Félicien Rops mais en l’absence de sa signature … J’ai eu beau chercher mais je n’arrive pas à trouver d’informations concernant cette gravure.

La légende indique : « imprimerie Houiste rue Hautefeuille 5 à Paris ».

Le format de la feuille est : 175 x 240 mm. Le format de la gravure aux bords de la cuvette est : 110 x 170 mm.

Je me permets donc de vous contacter en me disant que peut-être un des lecteurs érudits du « bibliomane moderne » ou vous-même auraient des informations.

Par avance merci,

Cordialement,
D.

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